Voir Plaques Tournantes sur viméo : cliquer ICI
Dan Mihaltianu est l’invité de la revue Chimères pour l’iconographie de son prochain numéro Devenirs-révolutionnaires
Voir Plaques Tournantes sur viméo : cliquer ICI
Dan Mihaltianu est l’invité de la revue Chimères pour l’iconographie de son prochain numéro Devenirs-révolutionnaires
La nature de l’herbe implique une tension vers un futur sans fin, celui de la croissance, de l’extension. Par là, l’herbe ne cesse de transformer ce qui apparaît comme ses limites provisoires, vagues, même si, dans nos villes ou nos campagnes urbanisées, l’herbe est entourée de murs, assignée à des zones limitées circonscrivant l’espace défini où l’herbe existe ici, à telle place – herbe sous surveillance, entretenue, fantasmée. Cette herbe humanisée implique un espace distinct d’un extérieur autre, une altérité à laquelle le désir de l’herbe est pourtant indifférent.
L’herbe n’a pas de murs, pas de frontières, elle ne se définit pas selon une altérité à laquelle elle s’opposerait. L’extension qui est son mouvement la prolonge au-delà d’elle-même mais transforme aussi ce qui l’entoure, l’intégrant à des rythmes confus de tiges et de feuilles, l’additionnant à tout un réseau herbeux, un entrelacs fragile de racines, un rhizome toujours plus large. Le monde selon l’herbe ne se divise pas en zones distinctes et circonscrites : l’herbe tend à devenir coextensive au monde, à s’étendre à la surface du globe jusqu’à le recouvrir d’un inimaginable réseau de milliards de kilomètres carrés. Le fait que dans nos espaces urbains l’herbe soit rare et pousse où elle peut, comme elle peut, dans les espaces les plus improbables et clandestins, signifie son illimitation, indique son désir et ce que ce désir ouvre dans le monde.
Jean-Philippe Cazier
Extrait de l’éditorial de Chimères 82 / L’Herbe / juin 2014
En partenariat avec la Cité Nationale de l’Histoire de l’Immigration,
les éditions érès et Chimères vous invitent à la présentation du numéro 82 : L’Herbe, coordonné par Anne Querrien
dimanche 29 juin de 15h à 18h
en présence des auteurs au Palais de la Porte Dorée
Salle du Forum – entrée libre
l’après-midi sera clôturée à 17h30 par une intervention du Mécanoscope
Sucs / Performance pour deux voix multiples et une machine
Alain Engelaere – composition électroacoustique
Aude Antanse – voix
Marco Candore – voix et texte
Installation : Francine Garnier
Démontage d’un tour d’illusion.
L’assassinat dans une chambre fermée de l’intérieur, type même du crime parfait, décourage d’emblée toute enquête parce qu’il se présente comme impossible. Il en est de même, si l’on y songe, lorsque l’autre, de façon incompréhensible, par un mot, par un regard, nous tue. Or, il s’agit dans les deux cas d’un tour d’illusion. C’est ce que ce livre tentera de montrer.
Spinoza pensait que démasquer l’erreur ne suffit pas,encore faut-il dissiper l’illusion. « Pourvu que je puisse réfléchir à fond », écrivait ce clinicien de l’imaginaire. Et il jetait les bases d’une nouvelle rationalité. À la démarche spinozienne, ce livre propose d’associer la méthode freudienne de l’association libre.
La parole alors, parfois, livre ses secrets. Parler, en effet, c’est adapter son vocabulaire, sa mimique, ses intonations à l’autre en face de soi. Et puis, les mots que l’on prononce, les lester, en douce, de ses souvenirs, de ses émotions : leur donner du sens. C’est aussi, avouons-le, chercher à obtenir de l’interlocuteur une connivence que nous guettons dans son regard ; conforter notre image, dont la valeur à nos yeux fluctue sans cesse dangereusement. Cette finalité – être reconnu, réassuré –, nous la méconnaissons. De même ne pouvons-nous saisir le sens réel de nos paroles qu’après coup. Encore faudrait-il laisser venir, librement, nos associations.
Un front de libération des associations, tel est en effet l’enjeu de la lutte des rêves. Une résistance : celle de notre passé, de notre mémoire aux structurations plus ou moins appauvrissantes, aux montages plus ou moins angoissants, dans lesquels l’indispensable négociation avec l’autre, le passage par sa tonalité risqueraient de nous incarcérer. Car, appliquée aux rêves, la méthode de la libre association, la plus géniale de toutes les inventions freudiennes, fait de nous de véritables Houdini – magicien, roi de l’évasion –, capables de déjouer les faux huis clos, de démasquer le caractère illusoire de bien des enfermements.
« L’illusion joue un rôle capital dans toutes les branches du savoir humain ; innombrables sont les fausses vérités qui infestent nos connaissances et qui ne doivent leur existence qu’à l’illusion. J’attribue, pour une grande part, à l’étude des traités concernant l’illusionnisme, ses procédés, ses modes d’infiltration dans notre esprit, le fait que maintes fois, dans ma longue carrière, il m’est arrivé de redresser des notions classiques grâce aux disciplines que je dois à cette étude. »
Ce texte est d’Auguste Lumière qui, avec son frère Louis, invente le cinéma en 1895. L’année même où Freud, qui interprète pour la première fois l’un de ses rêves, entre par effraction dans l’histoire de la philosophie.
Max Dorra
Lutte des rêves et interprétation des classes / 2013
Écouter la discussion à propos du livre : les mardis de Chimères
Télécharger la suite de l’extrait en pdf :