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Gaza 2014 ou quel antisionisme ? / Sophie Bessis / Javier Bardem, Penelope Cruz et Almodovar contre les bombardements de Gaza / Mise en examen d’Alain Pojolat (NPA) / Soutenons les Palestiniens, dégageons les antisémites / Alternative libertaire

Depuis qu’Israël a «évacué» Gaza en 2005, Tsahal envahit régulièrement l’enclave au prétexte de neutraliser la capacité de nuisance du Hamas. L’opération «Bordure protectrice» lance aujourd’hui ses chars pour y éliminer les lanceurs de roquettes, au prix de la mort de centaines de civils que le langage militaire appelle «dommages collatéraux». Comme d’habitude, les parrains des deux camps finiront par obtenir un cessez-le-feu. Jusqu’à l’explosion suivante. Jusqu’à quand ?
Plus que jamais, cette tragique répétition et l’impossibilité pour les Palestiniens de vivre en peuple libre sur la terre qui est la leur obligent à reposer la question de l’antisionisme. Vu le caractère inacceptable de l’occupation israélienne, il est facile de se ranger sous sa bannière. Mais il faut, dans ce cas, définir l’antisionisme dont on se réclame.
Les nationalismes, à ne pas confondre avec la libération nationale, se reconnaissent entre autres à leur mythification systématique de l’histoire.
N’échappant pas à cette règle, la construction du roman national israélien repose sur une fiction et une imposture. Le mouvement sioniste a toujours affirmé le droit inaliénable du peuple juif à recouvrer «sa» terre en entretenant l’illusion qu’«une terre sans peuple» attendait le «retour» chez lui d’un peuple sans terre. Ce mensonge a longtemps rendu les Palestiniens invisibles aux yeux du monde. L’imposture, elle, a consisté à transformer l’immémoriale promesse messianique du retour des juifs en Terre sainte en droit de propriété exclusif sur un territoire auquel la Bible, passée du statut de livre saint à celui de manuel d’histoire, est censée servir de cadastre. Or, le sionisme est une idéologie née dans l’Europe de la seconde moitié du XIXe siècle qui a inventé l’Etat-nation, et légitimée par la multiplication des persécutions antijuives qui ont connu leur monstrueux apogée avec l’extermination des Juifs européens dans les camps de la mort nazis.
Pendant des décennies d’ailleurs, théologiens et rabbins ont refusé de le cautionner. Ils jugeaient que le moment du retour ne pouvait être fixé que par l’Eternel et voyaient le signe de l’élection du peuple juif dans le fait qu’il a reçu de Dieu la Loi, plus que la terre, donnée, elle, sous conditions. Construction historique moderne, le sionisme ne saurait donc octroyer par lui-même aucune légitimité à l’Etat-nation israélien qu’il a construit au prix d’une instrumentalisation du religieux et d’une entreprise coloniale n’ayant jamais voulu dire son nom, c’est-à-dire de la conquête, du nettoyage ethnique et de la négation des droits de ceux qu’il a expulsés ou soumis.
Sur le plan politique, comme tout nationalisme, le sionisme s’est donné pour mission de régner sur une communauté dont il s’est autoproclamé l’unique mandataire. Comme tout nationalisme, il définit pour elle un «espace vital» d’où doivent être bannis tous ceux qui portent atteinte à sa pureté. Jamais les dirigeants sionistes, avant puis après la création d’Israël, n’ont voulu désigner de frontières claires à leur Etat, convaincus que ce dernier doit englober la totalité d’un mythique «Eretz Israël» aux limites non définies. Tout au plus, les plus réalistes ont convenu qu’il faudrait un jour lâcher quelque chose, le moins possible, pour obtenir la paix. Mais ces réalistes ont été balayés par l’idéologie même qui était la leur. D’occupation illégale en répression brutale de toute aspiration palestinienne à l’autodétermination, Israël ne s’est donné que la guerre sans fin pour horizon.
Enfin, des siècles d’oppression dont les juifs ont été l’objet les dirigeants sionistes ont tiré une sorte de «droit» à l’impunité pour toute persécution commise, au nom de la réparation des souffrances subies. Cette posture n’est pas recevable. L’éthique oblige donc à l’antisionisme pour deux raisons au moins : les Palestiniens ont le droit de vivre libres dans leur pays, et la persécution subie, quelle qu’en ait été l’ampleur, n’autorise en aucun cas à devenir persécuteur, elle ne libère personne du respect du droit.
Voilà trois raisons, historique, politique, éthique qui donnent sens à l’antisionisme. La détérioration continue de la situation depuis l’échec d’Oslo a rallié à lui ceux qui crurent, sincèrement, que le sionisme pouvait régler de façon positive la «question juive», et qui en constatent aujourd’hui les dérives. C’est le cas de la gauche pacifiste israélienne qui regarde, terrifiée, sa société se laisser séduire par la droite la plus radicale. Antisionistes et postsionistes peuvent donc se rejoindre en un combat commun. A condition, on l’a dit, de savoir de quoi l’on parle.
Tout au long du XXe siècle, tous les nationalismes – portés par une inéluctable dynamique interne à leur point d’incandescence, c’est-à-dire à une modalité ou à une autre du fascisme, quel que soit le nom qu’on lui donne – ont engendré la mort, la destruction, les nettoyages religieux ou ethniques. A chaque fois, des hommes et des femmes se sont levés pour combattre les assignations identitaires, la haine raciale, la stigmatisation des minorités, et pour ouvrir d’autres pistes aux aventures humaines. C’est au nom de ces principes qu’il faut être antisioniste. Pas au nom d’un nationalisme concurrent. Or, la majorité des élites arabes et des opinions qu’elles formatent combattent le sionisme en usant du même logiciel. Elles sont, elles aussi, habitées par le fantasme de la pureté, qui engendre l’exclusion de l’autre du territoire, de la mémoire, de la culture. Le nationalisme arabe a ainsi procédé depuis plus d’un demi-siècle à une série d’épurations ethno-religieuses qui ont exclu des communautés nationales tout ce qui n’était pas arabo-musulman. Cela n’exonère pas le sionisme de ses méfaits. Cela ne donne ni moyens ni légitimité pour le combattre. Pour les parties séculières des opinions arabes, la Palestine est un territoire arabe à récupérer. Pour leurs segments religieux, c’est une terre musulmane qui doit revenir à la Oumma. Les uns et les autres mènent une bataille identitaire contre Israël, dans laquelle les intérêts des Palestiniens réels ne pèsent pas grand-chose, l’histoire l’a, plus d’une fois, montré. La diabolisation courante de tout juif en archétype sioniste a, en outre, conduit la majorité des Arabes à un intolérable déni d’histoire passant par le refus de reconnaître la réalité du génocide hitlérien et par une cécité commode sur les ravages de leur propre nationalisme. Outre leur caractère insupportable, ces postures ont contribué à renforcer la rhétorique sioniste qui n’a cessé de jouer sur la menace antisémite pour souder autour d’elle la société israélienne.
Que faire pour sortir de l’impasse ? D’un côté, la droite israélienne au pouvoir ne veut pas d’un Etat palestinien, si modeste et impuissant soit-il. Pour elle, l’Etat hébreu a vocation à s’étendre de la mer au Jourdain. Or, jamais les Palestiniens ne se résigneront à vivre dans la servitude. De l’autre, une société israélienne existe, si discutables que soient les bases sur lesquelles a reposé sa création. Enfin, la colonisation systématique de la Cisjordanie, où vit désormais 10% de la population juive israélienne, éloigne chaque jour davantage la possibilité de la partition de la Palestine historique en deux Etats. L’occupation a produit le paradoxe d’instaurer l’apartheid dans le cadre d’un mélange inextricable. Dans la mesure où ni les Palestiniens ni les Israéliens juifs ne quitteront une terre qui est la leur ou qui l’est devenue, c’est donc à une autre forme de coexistence qu’il faut désormais songer. Pour que le rêve d’une cohabitation égalitaire puisse se transformer en horizon possible, les Arabes doivent renoncer au stérile déni d’existence de la société israélienne. Seul un combat commun entre les anticolonialistes israéliens et les gauches arabes libérées du vieux réflexe tribal pourrait permettre de briser le cercle. L’antisionisme libérateur ne peut être, de part et d’autre, qu’un antinationalisme.
Sophie Bessis
Gaza 2014 ou quel antisionisme ? /2104
Publié le 30 juillet 2014 dans Libération

À lire :
Javier Bardem, Penelope Cruz, Almodivar contre les bombardements de Gaza

Libération
El Diario
Europa Press

et :
Mise en examen d’Alain Pojolat (NPA)
Soutenons les Palestiniens, dégageons les antisémites / Alternative libertaire

Manif samedi 2 août 15h Denfert-Rochereau Paris

intervention divine

Gaza dans ma tête / Jean-Philippe Cazier

israel-pacifistes

Nous en sommes à combien de morts ? 800 morts ? 900 ? Mille morts ? 1500 morts ? Il semble que Gaza soit le nom d’une terre peuplée de morts. Quelqu’un a-t-il calculé quel nombre de morts il fallait atteindre pour – pour quoi au juste ? Le nombre de morts augmente chaque jour, chaque heure. Et ce comptage paraît absurde, vide, tournant à vide comme une mécanique sans but. S’agit-il seulement de tuer, de tuer des gens ? On ne sait pas. On nous dit qu’il y a eu mille morts à Gaza depuis le début des bombardements israéliens. Nous ne savons pas qui sont ces morts. Leur nom ? Leur visage ? Le visage et le nom de chacun d’eux, parce que je suis dans une civilisation où le nom et le visage sont ce qui demeure d’un vivant – jusqu’à ce qu’il soit oublié, qu’il disparaisse, comme s’il n’avait jamais existé. Dire « il y a eu mille morts », « il y a mille morts », est-ce que cela veut dire : ces morts n’existent pas, ces mille vivants n’ont jamais existé ? Le chiffre 1000, l’idée qu’il y a eu « mille morts » laissent sans idée, sans représentation, sans existence.
Depuis que je suis enfant, je sais qu’il y a un conflit, une guerre (comment l’appeler ?). Je le sais parce que depuis 48 ans des images de ce conflit traversent régulièrement, parfois quotidiennement, les écrans de télévision. Les journaux font leur « une » sur ce conflit qui, pour moi, a toujours été là. Je sais aujourd’hui par les médias qu’il y a eu 1000 morts à Gaza depuis le début des bombardements de l’armée israélienne, depuis le début du mois de juillet 2014. Mille morts – plus sans doute – en 20 jours. Depuis 48 ans, combien y a-t-il eu de morts ? Depuis 48 ans que ma vie est régulièrement traversée par ce conflit – cette guerre ? –, combien y a-t-il eu de morts ? De combien de morts lointains, proches, ma vie est-elle ainsi entourée ? Combien de morts palestiniens ? Israéliens ? Combien de milliers, peut-être de millions de morts ? Et combien, parmi ceux qui sont encore en vie, ont vu et voient leur vie massacrée ? Les chiffres recouvrent tout, la mort et la vie de chacun. La grandeur de ces chiffres laisse la tête vide. Laisse un peu hébété. On ne comprend pas : mille morts, dix-mille morts, 500000 morts ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Quel est le but de cette addition sans fin depuis tant d’années ?
On se souvient d’Auschwitz. On se souvient que six millions de Juifs ont été assassinés dans les camps de la mort nazis. Je ne dis pas cela pour identifier l’État israélien actuel aux dirigeants nazis, pour identifier la politique israélienne actuelle au nazisme. L’équation Israël = nazisme ne veut historiquement rien dire, n’a aucune efficacité politique, mais est surtout une idée antisémite, l’idée actuelle d’un révisionnisme antisémite. Auschwitz est le nom qui vient à l’esprit lorsque l’on pense à ce fait : six millions de Juifs ont été assassinés dans les camps de la mort nazis. Dans les camps d’extermination, comme on dit. « Mort » ? « Extermination » ? Est-ce que ce sont les mots qui conviennent ? Est-ce que ce sont les mots qui correspondent à ce chiffre, qui sont à la hauteur de ça : six millions de Juifs sont morts assassinés par les nazis ? Là encore on reste seul devant ce chiffre, devant l’énormité de ce chiffre qui recouvre tout – tous les noms, les visages, les pleurs, les cris, les regards – et qui ne dit rien d’autre que cette mesure inimaginable du meurtre de six millions de Juifs, assassinés parce que Juifs. Mais que dit ce chiffre, également, sinon que ces Juifs n’ont jamais existé ? Est-ce que ce n’est pas cela que voulaient les nazis : tuer des millions de Juifs pour que l’immensité du nombre efface l’existence même de ceux qui ont été assassinés ? Tuer en masse pour supprimer de la surface de la Terre, mais surtout pour que ces millions d’individus n’aient jamais existé ? Est-ce que ce n’est pas cela que fait aujourd’hui l’État israélien, qu’il fait depuis des années : nier l’existence des Palestiniens, les tuer en masse parce que pour l’État israélien les Palestiniens n’existent pas ?
Il semble que les guerres actuelles produisent une mort de masse et surtout produisent des chiffres. Mort industrielle, si l’on veut, puisqu’un des buts de l’industrialisation est de produire des quantités nombrables. Ainsi, la mort devient abstraite, mais la vie aussi. Bombarder une ville, ce n’est pas tuer, c’est atteindre un certain chiffre. Tuer six millions de Juifs, ce n’est pas tuer, c’est remplir un cahier des charges. Tuer mille Palestiniens, ce n’est pas tuer, c’est continuer l’addition de morts qui n’ont jamais existé. La mise à mort, ici, est autant suppression de la vie que négation de la vie – un négationnisme qui devient le principe d’une politique pour laquelle certains vivants sont éliminés parce qu’ils n’existent pas. Ce négationnisme est le principe de la politique d’Israël depuis le début – les Palestiniens n’existent pas – et les bombardements actuels de la population de Gaza n’en sont que la forme la plus visible, le prolongement militaire et médiatique. Une politique où l’industrialisation de la vie et de la mort est le principe de gestion des peuples – peuples dont l’existence est dans tous les cas et de toute façon niée. Et l’idée même de peuple relève de cette logique : un peuple, ça n’existe pas. Vivants, vous n’existez pas. Et morts, vous n’existez pas non plus. Chiffres à la chaîne, comptabilité d’entreprise. Ça a commencé avec Auschwitz, ça continue aujourd’hui, à Gaza.
Cet accroissement du nombre de morts palestiniens dit aussi autre chose : l’absurde mécanique, la surenchère de l’assassinat de masse montrent que, dans ce cas, le gouvernement et l’armée d’Israël n’ont pas de but sinon celui de tuer encore, d’accroître encore le nombre de morts. Pourquoi? Dans quel but tous ces morts – ces cadavres anonymes, ces vies rendues anonymes par la mort de masse –, dans quel but tous ces morts palestiniens et israéliens ? On ne sait pas, parce qu’au fond il n’y en a pas. Le but n’est pas simplement de tuer, mais de tuer le plus possible, encore. De tuer jusqu’à quand ? Jusqu’où ? Jusqu’à quelle limite qui donnerait un sens à ces milliers de cadavres et de vies massacrées – des vies palestiniennes et israéliennes ? L’État israélien justifie ces morts par la nécessité de se protéger. Mais on ne voit pas le rapport qu’il pourrait y avoir entre cet impératif de protection d’un État, de ses habitants, et ces milliers de morts depuis des années – et pour combien d’années encore ? Pour toujours ? Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus un seul Palestinien ? Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus un seul Israélien ? On ne comprend pas quelle équivalence mathématique permettrait de penser que des milliers de morts civils, que l’assassinat de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, garantissent la protection d’un État. On ne comprend pas comment bombarder une population sans défense, enfermée dans les frontières d’un territoire minuscule, comment bombarder des enfants sur une plage, comment bombarder des écoles et des hôpitaux, pourrait être le moyen d’une politique de défense pour un État. On ne le comprend pas parce qu’il n’y a pas de rapport, parce que ces bombardements et ces morts ne servent pas à défendre quoi que ce soit. Parce que tous ces morts depuis des années ne servent à rien, sinon à augmenter le nombre de morts palestiniens et le nombre de morts israéliens. C’est cela que fait l’État d’Israël : tuer la population palestinienne au nom de sa propre survie, mettre la population israélienne dans la situation d’être tuée au nom de sa propre protection. Se protéger en éliminant une population sans défense, sans armée, pour un État, est-ce vraiment se protéger ? N’est-ce pas plutôt une forme de génocide ? Protéger sa propre population en la maintenant dans le danger, en envoyant sa jeunesse se faire tuer, est-ce vraiment la protéger ? N’est-ce pas plutôt une forme, là aussi, de mise à mort ? C’est cette absurdité d’une mort générale et pour tous, une mort industrielle et aveugle, qui se déroule sous nos yeux depuis des années et qui tient lieu de principe et de finalité politiques pour l’État d’Israël. La mort est leur métier…
Je peux dire tout cela parce que je ne suis pas sous les bombardements et que je ne suis pas depuis des années soumis à la politique folle d’Israël. Je ne suis pas Israélien, je ne suis pas Palestinien. Je vis loin du conflit, géographiquement éloigné de ce qui se passe quotidiennement depuis des années dans cette région du monde. Si j’étais Palestinien et vivant à Gaza, peut-être que je distinguerais entre les morts palestiniens et les morts israéliens. Et peut-être que j’aurais raison. Parce que, aussi, cela me permettrait de survivre, et serait ma façon de trouver une logique et d’espérer. Je ne sais pas. Je ne peux parler que de mon point de vue.
Je sais qu’il y a un conflit, une guerre – comment appeler ça ? – car en un sens, depuis 48 ans, je vis avec ce conflit. Mais qu’est-ce cela signifie ? Je devrais dire : je sais qu’il y a un conflit parce que depuis 48 ans j’en vois des images, des photographies, j’entends des discours qui en parlent. Je me souviens des images de Yasser Arafat. Je me souviens des images de Sabra et Chatila. J’ai lu le texte si fort de Jean Genet sur ce massacre. J’ai lu des articles, j’ai parlé avec des gens. J’ai vu des images de jeunes soldats israéliens et des images de jeunes « martyrs » du Hamas. J’ai vu des photographies de cadavres d’enfants palestiniens. Des photographies de soldats israéliens de 18 ans, de 20 ans, faits prisonniers et exécutés. J’ai vu des reportages sur les colonies israéliennes et la haine de ces colons à l’égard des Palestiniens. J’ai vu des reportages sur des familles de colons désemparées, terrorisées. J’ai vu des photographies de mères palestiniennes déchirées par la mort de leurs enfants. Je me souviens de la poignée de mains entre Yasser Arafat et Yitzhak Rabin et de l’assassinat d’Yitzhak Rabin par un jeune Juif israélien. Je me souviens de ces images, de ces discours qui pour moi – et pour tous ceux comme moi – non seulement constituent ce que je sais de ce conflit, mais sont le conflit lui-même. Ce conflit est pour moi, de manière directe, un ensemble de photographies et d’articles. Et rien de tout ceci ne me permet de parler comme si j’étais un Palestinien vivant à Gaza ou un Israélien vivant à Jérusalem.
De quoi parler alors ? Et pourquoi parler ? Pourquoi écrire ce texte, sinon parce que je peux parler de la douleur et de l’incompréhension que ces images et ces discours sur le conflit produisent en moi. Et parce que cette douleur, cet effroi, cette incompréhension sont ce qui me relie à Gaza et à Israël, aux gens de Gaza et du territoire israélien – sont ce qui me relie à quelqu’un, quelque part à Gaza ou à Jérusalem, et qui doit lui aussi, vivant ce qu’il vit, sur place, avec les siens, connaître cette douleur, cet effroi, cette incompréhension face à une course folle au massacre et à la mort. À travers ces images, à travers ma mémoire, par cette douleur et cette indignation, je peux parler non à la place des Israéliens ou des Palestiniens, mais avec quelque chose qui nous lie. C’est cela, ici, ce que je peux faire pour ne pas en rester au spectacle médiatique permanent, pour ne pas en rester au comptage des morts, pour ne pas être abruti par le déferlement de photographies atroces, de discours simplificateurs, truqués, racistes, antisémites. Et essayer de dire, aussi, quelque chose de ce qui se passe. Ailleurs. Loin. Ici.
Jean-Philippe Cazier
Gaza dans ma tête / 2014
Publié sur son blog Mediapart le 27 juillet 2014
À lire sur le Silence qui parle :
Si nous le voulons / Mahmoud Darwich / Indiens de Palestine / Gilles Deleuze
Photo : Intervention divine / Elia Suleiman / 2002

interventiondivine

Barbarie : ils tuent en Palestine grâce au silence de « la communauté internationale » / Union Juive Française pour la Paix

La logique criminelle et illégale de la vengeance israélienne s’étend à toute la Palestine et à Gaza une nouvelle tuerie de masse est en marche.

Pour la seule journée du 8 juillet, il y a eu plus de 220 raids israéliens. 28 Palestiniens sont morts (dont trois enfants et deux femmes) à la suite des bombardements aériens et par mer. Ils n’auront droit à aucune compassion de François Hollande. Pour « justifier » ces exécutions extrajudiciaires, l’occupant israélien qualifie à l’avance les victimes de « terroristes » ou de « membres du Hamas ». Depuis le début du blocus de Gaza, si l’on enlève les 1400 morts de « Plomb Durci » (2008-2009) et les 160 morts de « Piliers de la défense » (novembre 2012), près de 700 civils palestiniens ont été exécutés par des tirs aériens à Gaza.

Les principaux dirigeants français, européens ou américains ont manifesté leur émotion à la suite du kidnapping et de l’exécution des trois jeunes colons. Pas de condoléances pour le massacre d’un jeune Palestinien de 16 ans, Mohammad Abou Khdeir. L’occupant a longtemps fait croire qu’il s’agissait d’un règlement de compte inter-palestinien avant que les coupables, des colons pogromistes, ne soient découverts. Quelle crédibilité peut-on accorder aux accusations des autorités israéliennes contre le Hamas ?

Que signifie cette offensive générale, cette « punition collective » formellement interdite par le droit international ? Pourquoi ces bombardements massifs, ces arrestations de plusieurs centaines de personnes, dont des élus et des prisonniers récemment libérés, ce bouclage de toute la Palestine ?

Il n’y a aucune symétrie possible entre l’occupant et l’occupé, entre un régime colonial et un peuple qui a le droit de résister. Avec la mobilisation des réservistes en Israël, un nouveau crime de grande ampleur est en marche.

Comme nous l’écrit quotidiennement Ziad Medoukh depuis Gaza assiégée, Gaza résiste et conserve dignité et espoir.

Nous devons empêcher le massacre annoncé. Nous devons forcer nos dirigeants complices à exiger d’Israël l’arrêt immédiat de l’agression, des bombardements, des arrestations et des exécutions sommaires. Nous appelons à descendre dans la rue partout où il y a des manifestations en solidarité avec la Palestine.

Le Bureau National de l’UJFP le 9 juillet 2014

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