Archive pour le Tag 'occupy'

#occupyDGSI / dimanche 21 juin 2015

Après l’Assemblée nationale, la loi sur le renseignement a donc été validée par le Sénat à une forte majorité. Les lois scélérates sont toujours votées à de « larges majorités ». C’est quelques années plus tard que l’on s’avise de l’erreur commise. Quand il est trop tard. Quand le mal est fait, et entré dans les mœurs.

La loi sur le renseignement, c’est malgré tous les dénis gouvernementaux le coup du Patriot Act, avec quatorze ans de retard. Fort heureusement, nous avons pu voir ce que cela donnait, depuis le temps. Nous sommes déjà plus d’une décennie après la « loi sur le renseignement ».

Donner aux services de renseignement le pouvoir d’intercepter tout ce que bon leur semble, cela donne la NSA et donc Snowden, la NSA et le scandale de la NSA. C’est un fait désormais établi : les milliards d’interceptions du programme PRISM ont permis en tout et pour tout de déjouer « peut-être un » attentat, et en réalité aucun.

C’est donc que le but de la surveillance de masse n’est pas de déjouer des « attentats terroristes », mais la surveillance de masse elle-même ; le « terrorisme » sert de prétexte à une tout autre politique.

L’étrange raisonnement qui consiste à dire « puisque la police a telle ou telle pratique illégale, autant la légaliser » plutôt que d’en déduire, ce qui serait tout de même plus logique, qu’elle doit cesser d’avoir ces pratiques, relève d’une sidérante démission devant la souveraineté policière. Si la sous-direction antiterroriste se mettait à régulièrement torturer des suspects « afin de déjouer des attentats », dirait-on : « il n’y a qu’à légaliser la torture » ? Dire oui, c’est la guerre d’Algérie. Ou les extraordinary renditions de la CIA après le 11 septembre, dont le Sénat américain a jugé à l’automne dernier que les États-Unis y avaient « perdu leurs valeurs ». C’est, à l’autre bout, la même logique devenue folle qui fait conclure à des parlementaires que pour éviter que des manifestants ne soient blessés par la police, il n’y a qu’à leur interdire de manifester.

Avant de donner un pouvoir sans contrepartie aux services de renseignement, avant de mettre la police antiterroriste à l’abri de tout contrôle et de tout recours, il n’est pas mauvais d’écouter ce que ces gens-là disent de leur « métier ». Ainsi cet Alain Chouet, qui dirigea le Service de renseignement de sécurité de la DGSE : « C’est ne rien comprendre que d’accuser les services secrets de faire « dans l’illégalité ». Bien sûr qu’ils font « dans l’illégalité ». Ils ne font même que cela. C’est leur vocation et leur raison d’être. Le renseignement se recueille en violant ou en faisant violer la loi des autres.(…)

Considérant cette fin, il va de soi que les moyens mis en œuvre seront en rapport : manipulation, séduction, corruption, violence, menace, chantage, au terme d’un processus qui aura mis à nu toutes les facettes de l’objectif visé, pénétré son intimité, exploité toutes ses vulnérabilités ». Sommes-nous sûrs de vouloir faire un chèque en blanc à ce genre d’individu, comme le fait la loi sur le renseignement ?

 

Depuis que la DCRI existe, on n’a connu d’elle que des scandales, des ratages et des mensonges sur ses ratages.
Elle a même dû se rebaptiser DGSI pour faire oublier la si mauvaise réputation qu’elle s’était faite en si peu d’années d’existence.

La loi sur le renseignement est essentiellement faite pour que de futurs scandales à son sujet ne sortent pas, et pour verrouiller une situation sociale métastable, un contexte politique tendant vers l’ingouvernable.

Le train de lois et de propositions de lois toujours plus féroces que le gouvernement multiplie depuis les attentats de janvier s’apparente à une offensive omnilatérale profitant de l’état de choc de la population. Une conseillère du ministre du Commerce britannique, n’écrivit-elle pas à ses collègues, dans l’heure qui suivit l’attentat du 11 septembre : « C’est un très bon jour pour faire ressortir et passer en douce toutes les mesures que nous devons prendre » ? Loi Macron, Rebsamen, sur le renseignement, réforme du droit d’asile, loi anti-squat, etc., font système. Elles sont autant de fronts ouverts simultanément dans une sorte de blitzkrieg social. Dans ce dispositif, la loi sur le renseignement fonctionne comme un verrou, un verrou contre les révoltes logiques ; et puisque c’est la DGSI qui sera en charge de « gérer » les mouvements naissants, les dissidences potentielles et les futures interdictions de manifester, c’est devant ses locaux que nous proposons de manifester le jour de la fête de la musique.

Allons voir où sont ceux qui nous surveillent !
Prenons la rue à ceux qui nous préfèrent chacun chez soi !
Faisons connaissance au nez et à la barbe de ceux qui nous connaissent si bien !

Nous appelons donc tous ceux qui luttent contre les nouvelles lois, tous ceux pour qui elles ne passent pas, tous ceux qui refusent de simplement subir l’offensive gouvernementale actuelle, à se réunir pour un banquet et une vaste assemblée populaire au pied du siège de la DGSI (84, rue de Villiers, Levallois-Perret), de midi à 18h, le dimanche 21 juin.

Les signataires de l’appel
Confédération Paysanne
Solidaires
Syndicat de la Magistrature
Ligue des Droits de l’Homme
Fédération Anarchiste
Parti de Gauche
Alternative Libertaire
Syndicat National des Journalistes
Syndicat des Avocats de France

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Démocratie radicale / Judith Butler / Chimères n°83 Devenirs révolutionnaires

Jean-Philippe Cazier L’œuvre de Marx est indissociable de l’idée de révolution. Dans vos textes, l’idée de révolution semble avoir disparu, disparition qui se constate d’ailleurs dans la plupart des pensées critiques actuelles. Dans votre cas, la relativisation de cette idée ne s’accompagne pas d’une résignation à l’ordre néolibéral et hétérosexiste, car est maintenue une critique des dominations ainsi que la volonté de produire des mutations positives par rapport à celles-ci. Quelles perspectives théoriques et pratiques vous semblent aujourd’hui intéressantes pour une subversion réelle ?

Judith Butler Je ne suis pas opposée à la « révolution » et dans beaucoup de cas je revendique les révolutions. Mais ce qui me semble problématique est l’idée qu’il y aurait seulement deux possibilités formant une alternative : la révolution ou la résignation au statu quo. Je pense que cette logique binaire est paralysante politiquement et qu’on doit être capable de penser des transformations politiques signifiantes qui ne « se soumettent » pas toujours à l’idéal révolutionnaire. Je ne considère pas le « réformisme » comme une bonne alternative mais, encore une fois, on peut voir facilement les cas où la seule alternative à la révolution que l’on conçoive est une « complicité » avec d’abominables régimes du pouvoir. Je pense qu’il faut parfois travailler avec et contre des formes de pouvoir dont nous souhaiterions la disparition, mais seulement parce que j’essaie, comme beaucoup d’autres, de trouver des alternatives aux formes de paralysie politique. Par exemple, j’ai constaté que ceux qui jettent l’opprobre sur toutes les formes de militantisme sauf sur celles qui sont placées sous le signe de la révolution ont tendance à adopter une distance cynique vis-à-vis des mouvements populaires, en affirmant qu’il vaut mieux rester critique et distant que s’engager dans des mouvements dont les objectifs ne sont pas suffisamment révolutionnaires. Mon point de vue est que certains mouvements – je pense ici à Occupy, à Gezi Park, à Puerta del Sol, et aux soulèvements des favelas brésiliennes – exposent et s’opposent à des formes de mises à l’écart économiques et demandent une restructuration radicale des relations économiques. Mais très souvent les « radicaux » ne jugent pas utile le recours au langage de la « révolution », chargé d’une certaine histoire, associé à des partis établis, et leur lutte populaire cherche à articuler la création de nouvelles formes de collectifs et la transformation politique. Aussi, dans ces cas, il ne s’agit pas de savoir si on est dans la révolution ou dans la résignation, ce qui reste une opposition binaire conceptuellement pauvre. Il s’agit plutôt de concevoir de nouvelles modalités pour des luttes populaires qui permettent l’expansion de formes de solidarité démocratique qui s’opposent à l’exploitation, à la marginalisation, à la dépossession et à la suspension et l’abrogation des principes de base de la citoyenneté.

Votre travail, dès Trouble dans le genre, inclut un déplacement des points de vue qui accompagnent la question du pouvoir et celle des dominations. Vous abordez ces questions en prenant comme objets les normes et l’identité et vous centrez vos analyses du pouvoir et des processus de domination sur une analyse critique des normes et de l’identité. La question du rapport entre le pouvoir, les normes et les identités, a été développée par Foucault mais vous la posez d’une façon nouvelle. Qu’est-ce que la mise en rapport du pouvoir avec les normes et les identités apporte pour la compréhension du pouvoir et des processus de domination qu’il induit ? Qu’est-ce que cela implique comme possibilités de mutation ou de subversion ?

Je suis probablement en désaccord avec Foucault, mais il s’agit de quelque chose que moi-même je ne suis pas en mesure d’analyser ou d’expliquer très facilement. J’ai une dette importante à l’égard de Foucault qui a exposé la manière dont le sujet est produit par le pouvoir et, en même temps, se constitue lui-même en relation aux termes du pouvoir. « Pouvoir » est un terme très large, et Foucault a montré clairement qu’il ne signifie pas la même chose dans tous les contextes. Aussi, quand nous pensons la façon dont un sujet arrive à se constituer lui-même ou elle-même en termes de pouvoir, nous parlons toujours des normes qui gouvernent le processus de subjectivation (assujettissement). Autrement dit, les normes sont les moyens par lesquels le pouvoir opère dans le processus de formation d’un sujet, et plus précisément dans cet aspect de la formation du sujet que nous comprenons comme une auto-constitution. Pour Foucault, ce passage vers la compréhension de la façon dont le sujet se constitue lui-même en relation au pouvoir a été un point de départ crucial dans Le Souci de soi et les travaux suivants, notamment L’Herméneutique du sujet. Il considère les deux manières dans lesquelles le « souci de soi » peut être cultivé surtout à travers une analyse des traditions ascétiques. Mais il pense aussi la façon dont le travail sur soi du sujet pourrait être approfondi, et le pouvoir être efficacement considéré comme une dimension réflexive de ce même sujet.  De cette façon, son cours Mal faire, dire vrai constitue une remise en question très importante de Surveiller et punir. Dans Surveiller et punir, le prisonnier est constitué par le pouvoir et le problème de l’auto-constitution n’est pas essentiel. Mais dans Mal faire, dire vrai il me semble que Foucault comprend comment la dimension performative de l’aveu fonctionne en tant qu’opération réflexive du pouvoir. Ceci n’est pas possible, bien sûr, sans des normes qui précisent ce que cela signifie d’être un bon criminel, comment on peut avouer être un fou ou un criminel sans effectivement chercher à coïncider avec ces normes. Les normes sont plutôt la façon dont le pouvoir émerge dans le mécanisme très spécifique de l’auto-constitution. Il est vrai que je convoque la psychanalyse pour considérer la dimension phantasmatique de ces normes et du pouvoir de ce que Freud a appelé « la culture de la pulsion de mort » dans la mesure où elle opère à travers des formes surmoïques d’autorégulation. Je sais que c’est un point qui est sujet à controverses, mais je pense que la théorie de Foucault peut être utilement intégrée par le recours à certains aspects de la psychanalyse.
Judith Butler
Démocratie radicale / 2014
Extrait de l’entretien avec Jean-Philippe Cazier
Chimères n°83 Devenirs révolutionnaires

Photo Dan Mihaltianu

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A propos d’Occupy Wall Street / Guattari Group New-York / Chimères n°79, Temps pluriels

Occupy a été un porte-voix relayé par beaucoup de monde et résonne encore de manières différentes. Cette voix, que nous appelons maintenant « Occupy », est devenue audible grâce à des personnes dispersées sur de nombreux fronts, qui se battaient depuis longtemps contre diverses formes d’oppression et rassemblées pour la première fois. Occupy devenait l’attracteur visible de ces formes collectives invisibles, oppressées. New-York, ville connue pour son charme et si bien décrite dans les films d’Hollywood, devenait capable de produire un film différent. La réalité venait trouer la station touristique placide, fortement contrôlée par l’état, et la transformer en arène faisant voir au monde une nouvelle scène, celle du refus par un grand nombre de cette nouvelle forme d’économie perverse, le Capitalisme Libéral.
Cependant, l’occupation dont l’écho audiovisuel était propagé, devait constamment s’affronter, dans la réalité, avec les forces antagonistes de sa répression. Nous ne pouvons oublier les formes d’oppression qui ont été utilisées par l’État, tout le temps et encore maintenant, pour réprimer la formation d’une voix collective.
Il est nécessaire de rappeler comment cette voix polyphonique a été démantelée par la police, faisant appel à des forces et des tactiques militaires pour chasser le mouvement. Pendant tout ce temps, le parc Zuccoti a été isolé avec des barricades de métal et des cars de polices restés garés tout autour. La dispersion des occupants a été faite par des militaires. Des dizaines de soldats casqués ont surgi à trois heures du matin avec des menottes, exerçant un maximum de violence pour arrêter les gens en nombre. Les arrestations massives ont été une des principales tactiques utilisées par les forces de l’ordre pour empêcher le mouvement de se propager. Soudain, alors que le mouvement grandissait, de plus en plus d’agents du FBI circulaient dans le secteur, épiant les comportements et les propos des gens. Des policiers en civils s’infiltraient dans le mouvement, utilisant des gaz lacrymogènes et poussaient à la violence. Les policiers officiels perdaient facilement le contrôle d’eux-mêmes et arrêtaient pour un oui pour non. Des scènes de violence étaient enregistrées par les caméras de chaines de télévision pour dissuader les nouveaux arrivants. Des barrières métalliques de plus en plus nombreuses encerclait Occupy et des hélicoptères suivaient certains cortèges. Des policiers équipés de caméras filmaient le parc sans arrêt depuis des postes d’observation, tapant sur leurs téléphones mobiles, prenant les empreintes digitales, prélevant des échantillons ADN, scannant les iris. Des heures et des heures d’enregistrement vidéo ont été réalisées par la police avec des petites caméras portables à haute définition, ainsi que d’innombrables photos. Tout ce matériel a été déposé dans une grande banque de données. Pendant le mouvement, des millions de dollars ont été versés par les banques à la police pour leur permettre d’empêcher le mouvement de grandir.
L’opposition entre les gens et les forces de l’ordre, les tactiques utilisées pour démanteler toute possibilité de créer et de maintenir une demande collective pour un vrai changement, étaient évidentes et scandaleuses. Cette image doit être restituée dans tous ses détails. Il faut faire le relevé de la manière dont l’état contrôle et dissipe toute tentative de mouvement vers le changement, c’est l’une de nos stratégies possibles pour garder ce combat vivant. Les États Unis sont bien connus pour infiltrer et disséminer l’information et pour enseigner aux autres pays comment réprimer leurs propres citoyens. Ils sont experts dans la création de stratégies et de tactiques de répression. Il est par ailleurs intéressant de se souvenir que ces systèmes de contrôles sont financés par chaque individu présent sur la place, alors qu’un changement significatif est demandé. Nous étions en train de nous endetter pour nous faire observer, enregistrer, réprimer et exploiter.
Cependant, bien qu’il semble que ce soit un crime sérieux de créer des espaces où des luttes différentes se rassemblent et coexistent, ce porte-voix collectif reste aujourd’hui actif de manière souterraine, non moins que sa répression. La police continue de scruter l’histoire des occupants et cherche à assembler le puzzle qui révèlerait la manière dont cette voix s’est constituée. Ils poursuivent la constitution d’une banque de données toujours plus performante. Un autre aspect à mesurer concernant l’après Occupy est de discerner la façon dont, pendant ces mois, l’appareil d’état a développé une forme de contrôle plus sophistiquée que jamais. Aujourd’hui, l’internet gratuit est en train de disparaître et la circulation de n’importe quelle information est pratiquement traçable à tout moment. Il n’y a désormais plus aucune intimité. L’agencement collectif semble un concept bien lointain quand il se rapporte à des individus isolés, bien que cela reste certainement la seule façon d’agir réellement agir dans notre vie quotidienne et de créer différents groupes. Mais l’initiative doit partir de nous, de la manière dont nous coexistons avec l’autre, de la manière dont nous construisons un engagement commun. Elle doit rester une forme de production collective qui échappe aux règles démocratiques de la répression, aux relations abusives et perfides qui jouent en faveur du démantèlement de toute forme de singularité. Comment prendre possession de nos propres corps, comment ouvrir un espace de production détaché de ces formes d’échange qui valorisent toujours la quantification contre l’a-signifiance ? Comment produire des micro formations à partir de la dérive, de contingences réelles ?
Occupy a créé une image fantasmatique transitoire qui a réveillé les corps et engendré le désir de créer un espace de pure potentialité, déplaçant notre compréhension du mot « résistance » vers une pratique constante d’une forme de vie beaucoup plus animiste. C’est une forme qui refuse les logiques rationnelles de pensée lorsque les concepts de contrôle et de pouvoir sont en jeu.
Guattari Group New-York
A propos d’Occupy Wall Street / 2013
Publié dans Chimères n°79, Temps pluriels
A propos d'Occupy Wall Street / Guattari Group New-York / Chimères n°79, Temps pluriels dans Anarchies occupy-wall-st-alan-test1




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