Archive pour le Tag 'colonies'

Barbarie : ils tuent en Palestine grâce au silence de « la communauté internationale » / Union Juive Française pour la Paix

La logique criminelle et illégale de la vengeance israélienne s’étend à toute la Palestine et à Gaza une nouvelle tuerie de masse est en marche.

Pour la seule journée du 8 juillet, il y a eu plus de 220 raids israéliens. 28 Palestiniens sont morts (dont trois enfants et deux femmes) à la suite des bombardements aériens et par mer. Ils n’auront droit à aucune compassion de François Hollande. Pour « justifier » ces exécutions extrajudiciaires, l’occupant israélien qualifie à l’avance les victimes de « terroristes » ou de « membres du Hamas ». Depuis le début du blocus de Gaza, si l’on enlève les 1400 morts de « Plomb Durci » (2008-2009) et les 160 morts de « Piliers de la défense » (novembre 2012), près de 700 civils palestiniens ont été exécutés par des tirs aériens à Gaza.

Les principaux dirigeants français, européens ou américains ont manifesté leur émotion à la suite du kidnapping et de l’exécution des trois jeunes colons. Pas de condoléances pour le massacre d’un jeune Palestinien de 16 ans, Mohammad Abou Khdeir. L’occupant a longtemps fait croire qu’il s’agissait d’un règlement de compte inter-palestinien avant que les coupables, des colons pogromistes, ne soient découverts. Quelle crédibilité peut-on accorder aux accusations des autorités israéliennes contre le Hamas ?

Que signifie cette offensive générale, cette « punition collective » formellement interdite par le droit international ? Pourquoi ces bombardements massifs, ces arrestations de plusieurs centaines de personnes, dont des élus et des prisonniers récemment libérés, ce bouclage de toute la Palestine ?

Il n’y a aucune symétrie possible entre l’occupant et l’occupé, entre un régime colonial et un peuple qui a le droit de résister. Avec la mobilisation des réservistes en Israël, un nouveau crime de grande ampleur est en marche.

Comme nous l’écrit quotidiennement Ziad Medoukh depuis Gaza assiégée, Gaza résiste et conserve dignité et espoir.

Nous devons empêcher le massacre annoncé. Nous devons forcer nos dirigeants complices à exiger d’Israël l’arrêt immédiat de l’agression, des bombardements, des arrestations et des exécutions sommaires. Nous appelons à descendre dans la rue partout où il y a des manifestations en solidarité avec la Palestine.

Le Bureau National de l’UJFP le 9 juillet 2014

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Des descendants d’Haïtiens deviennent des « apatrides » en République dominicaine / Roberson Alphonse

La Cour constitutionnelle de la République dominicaine a publié jeudi une décision rendant « apatrides » les descendants d’Haïtiens nés sur le territoire dominicain après 1929. Cette Cour, dont la décision est « définitive », a octroyé un délai d’une année à la junte électorale dominicaine pour établir la liste de ces personnes « déchues de la nationalité dominicaine », a rapporté Associated Press. Ces personnes, certains descendants d’ouvriers haïtiens ayant travaillé dans les « batey », seront retirées de la liste électorale. Selon une étude réalisée avec le support de l’ONU, près de 210 000 Dominicains sont d’ascendance haïtienne. Quelque 34 000 personnes d’ascendance haïtienne issues de relations avec des ressortissants étrangers vivant en République dominicaine ont été dénombrées. Parallèlement, le gouvernement dominicain analysait déjà des actes de naissance de plus de 16 000 personnes alors que les autorités électorales avaient refusé d’émettre des documents d’identité à 40 000 descendants haïtiens. La décision sans appel de la Cour constitutionnelle de la République dominicaine a suscité une vague de réactions. Wade Mc Mullen, avocat du « Robert F. Kennedy Center for Justice & Human Rights », a confié à AP que beaucoup de personnes touchées par cette décision « sont effectivement des apatrides ». « Nous ne savons pas vraiment ce qui va leur arriver. Se basant sur ce que disent les autorités dominicaines, ces gens n’ont pas la citoyenneté dominicaine et devront effectivement quitter la République dominicaine pour aller en Haïti où ils n’ont pas la citoyenneté. Cela crée une situation extrêmement compliquée », a indiqué Mc Mullen, ajoutant que ces « apatrides » ont très peu de liens avec Haïti. Certains ne parlent même pas le créole, a-t-il dit. Ira Kurban, avocat spécialisé dans les questions d’immigration et de droits de l’homme, a indiqué que cette décision « peut conduire à des déportations massives ». « Elle conduira certainement à des discriminations massives ». « Ils s’apprêtent à démarrer le rassemblement des Haïtiens », a ajouté Ira Kurban. Roberto Rosario, président de la junte électorale, a souligné qu’il ne ne dénie le droit de personne à la nationalité dominicaine, ajoutant que « les gens seront en mesure de se légaliser à travers le plan de légalisation ». Cependant, ce plan n’a pas encore été monté, en dépit de l’existence d’une loi sur l’immigration votée en 2004. C’est frustrant pour tous ceux à qui on a dit subitement non, vous n’êtes pas Dominicains », a confié Elmo Bida Joseph, un étudiant de 21 ans, à qui on a refusé une pièce d’identité et une copie de son acte de naissance parce qu’il est le descendant de migrants haïtiens. « Tous mes rêves ont été brisés », a indiqué Bida, un joueur de baseball qui a besoin de ces documents pour s’inscrire à une académie, un centre de formation de baseball. « Je sens qu’à n’importe quel moment je peux être pris au coin de la rue pour être déporté en Haïti », a expliqué Elmo Bida Joseph. « La décision de la Cour constitutionnelle est extrêmement grave. C’est le génocide civil qui se poursuit », a commenté Colette Lespinasse du GARR sur Radio Kiskeya. Elle a appelé à la « mobilisation nationale et internationale » contre cette « décision raciste ». Par le passé, des décisions prises par les autorités judiciaires dominicaines ont été contestées par devant des juridictions internationale comme la Cour interaméricaines des droits de l’homme. « La funeste sentence du tribunal constitutionnel de la République dominicaine est l’évidence de la permanence dans certains secteurs dominicains d’une hostilité historique face à Haïti et aux Haïtiens. Elle donne lieu à la fois à un dangereux précédent, qui peut être reproduit, si elle n’est pas fermement combattue, contre d’autres communautés d’immigrants, y compris les Dominicains dans plusieurs pays à travers le monde », a réagi Edwin Paraison de la Fondation Zile et ex-ministre des Haïtiens vivant à l’étranger. « Le rejet dans l’ opinion publique de cette triste décision judiciaire est cependant la preuve palpable que le peuple dominicain reste un peuple solidaire avec la communauté haïtienne et qu’ il nous faut renforcer nos liens avec les secteurs démocratiques de la République dominicaine qui, comme nous, pensent que les relations entre les deux pays doivent prendre un autre cap », a-til dit. En 1929, il y eut une grande vague de migration haïtienne en République dominicaine. Dans la nuit du 2 octobre 1937, l’Etat dominicain, avec Rafael Trujillo en tête, avait organisé le massacre du « Persil » « perejil » à la machette et aux fusils qui avait fait entre 15 000 et 30 000 morts selon des sources. Rafael Trujillo, dès le premier jour de cette tuerie se déplace à Dajabon et prononce une allocution commentant l’événement : « Depuis quelques mois, j’ai voyagé et traversé la frontière dans tous les sens du mot. Pour les Dominicains qui se plaignaient des déprédations par les Haïtiens qui vivent parmi eux, les vols de bétail, des provisions, fruits, etc., et sont ainsi empêchés de jouir en paix des fruits de leur travail, j’ai répondu, « Je vais corriger cela ». Et nous avons déjà commencé à remédier à la situation. 300 Haïtiens sont morts aujourd’hui à Banica. Ce remède va se poursuivre. » Les atrocités se sont poursuivies jusqu’au 8 octobre 1937. Aujourd’hui, après des années mouvementées ponctuées de déportations d’Haïtiens dans des conditions inhumaines dénoncées par des militants des droits de l’homme, les deux pays entretiennent des relations commerciales importantes. La République dominicaine a annexé en douceur le marché Haïti. Même des allumettes sont importées de la République dominicaine qui applique une politique tarifaire plus que protectionniste. Après le séisme du 12 janvier 2010, grâce aux relations privilégiées du président Leonel Fernandez avec le président René Préval, des compagnies dominicaines ont raflé d’importants contrats. Rofi et Hadom, des compagnies du sénateur Felix Bautista construisent plusieurs édifices publics. Des dizaines de milliers de jeunes Haïtiens étudient en République dominicaine. Sur la Toile, certains disent être « choqués » mais pas surpris par la décision de la Cour constitutionnelle de la République dominicaine. Depuis l’embargo d’Haïti sur les produits avicoles dominicains, des propos guerriers et racistes ont été véhiculés dans la presse dominicaine.
Roberson Alphonse
Des descendants d’Haïtiens deviennent des « apatrides »
en République dominicaine
/ septembre 2013
Publié sur Le Nouvelliste
Des descendants d'Haïtiens deviennent des « apatrides » en République dominicaine / Roberson Alphonse dans Agora expo22

Le Code Noir (ou le calvaire de Canaan) / Louis Sala-Molins

Le Code Noir à l’ombre des Lumières : de Napoléon à Schoelcher
De belles éclaircies dans le ciel politique français. La grande nation retrouve les Antilles. Elle reprend pied à la Guadeloupe et à la Martinique et songe tout naturellement à reconquérir Saint-Domingue. Tout naturellement elle doit se donner les moyens de sa fin : dominer là-bas au Couchant, y produire, commercer. La loi du 30 floréal de l’an X (1802), en quatre articles, rétablit la traite, l’esclavage, le Code Noir et spécifie que les esclaves retrouveront, à tous points de vue, leur situation « juridique » d’avant 1789.
Deslozières, dont nous savons déjà l’inquiétude qui le tourmentait face au danger de « dégénération entière du peuple français » (1) exulte avec l’ensemble de l’opinion esclavagiste : « Et toi, féroce Africain, qui triomphes un instant sur les tombeaux de tes maîtres que tu as égorgés en lâche, (…) rentre dans le néant politique auquel la nature elle-même t’a destiné. Ton orgueil atroce n’annonce que trop que la servitude est ton lot. Rentre dans le devoir et compte sur la générosité de tes maîtres. Ils sont blancs et français. » (2)
La vision napoléonienne du problème afro-antillais est bien schématisée dans l’éructation de Deslozières. Pour que les maîtres blancs et français puissent sauvegarder leur maîtrise et en voir progresser vénalement les effets il faut réinstaurer la « loi de sang », le Code Noir, et gommer ainsi des mémoires des Noirs, et de leurs rêves si possibles, la moindre trace d’une possibilité de révolte (3). réinstaurer donc le Code Noir. Et poursuivre la traite. Il conviendra aussi, et c’est le troisième point, de dresser plus haut les barrières juridiques et raciales entre les Noirs et les métis, les métis et les Blancs, les Blancs et tous les sangs impurs (4). Napoléon ira jusqu’à ordonner à Leclerc d’expulser de Saint-Domingue toute femme blanche qui aurait eu des rapports sexuels avec des Noirs (5). Souvenons-nous des entrées que l’Ancien Régime semblait avoir ménagées, un temps, pour les Noirs et les métis sur le territoire métropolitain : on retrouve maintenant une interdiction totale de séjour, on la réitère (6). Une certitude : quoi qu’il en soit des récits colportés sur les motivations profondes du racisme maladif dont témoigne la politique antillaise de Napoléon, ses traductions juridiques n’allègent jamais les édits de 1685 et de 1724, elles les alourdissent toujours.
Culturellement, les positions des abolitionnistes de la fin du siècle, timorées pourtant, sont oubliées et bien oubliées. le thème de la stupidité naturelle du Noir, panachée désormais de férocité (Saint-Domingue oblige), jamais totalement enterré ni en métropole ni aux îles, envahit tout le terrain (7). Napoléon parti, la Restauration prend l’engagement de maintenir l’esclavage. On tue et on marque aux Antilles comme aux plus beaux jours du XVIII° siècle.
L’abolitionnisme renaît pourtant avec la Restauration. La première Société des Amis des Noirs avait francisé une initiative anglaise ; le mouvement abolitionniste du XIX°, autour des années 20, est à la traîne des initiatives prises outre-Manche par Wilberforce et Clarkson (8). Une comparaison des statuts des métis en territoire français, espagnol ou anglais de ces années-là montre qu’il vaut mieux être métis chez les Anglais, ou à la rigueur chez les espagnols que chez les Français (9). Le langage abolitionniste s’amalgame à des considérations moralisantes plutôt que revendicatrices et joue sur le registre de la charité ou de la bienfaisance, cependant que l’interdiction absolue de séjour – et de passage – en France des Noirs (10) reste en vigueur. Pas de mélange, plus du tout de risque de mélange.
Sur place, là-bas, les Blancs ne fléchissent pas et se disent fermement attachés au système discriminatoire sur lequel veille le Code Noir (11). La Couronne pousse à la christianisation effective (12) des Noirs et des métis, convaincue que c’est là le meilleur moyen de les tenir les uns et les autres courbés sous le devoir et de les éloigner de toute idée de révolte : le voisinage anglais et espagnol des Antilles françaises ne pouvait pas ne pas pousser les « esclaves » français à Dieu sait quels excès. cependant on quadrille et poursuit, on pend et on décapite. On fait aussi dans la mesure et dans la modération : à trois ans de l’abolition définitive et en référence au Code Noir et à des décrets postérieurs qui dosaient les coups et leur intensité, une loi de 1845 réduit les punitions corporelles et autorise l’esclave à monnayer sa liberté, que cela plaise au maître ou que cela lui déplaise (13).
C’est que l’Etat couronné penche, petit à petit, vers l’abolition. Par raison ? Par bonté d’âme ? Par intérêt ? Par accommodement aux pression étrangères ? Par tout cela à la fois et dans l’indifférence quasi-générale, quelque regain de l’abolitionnisme qu’on puisse noter sous Louis-Philippe (14). Les hommes d’Eglise s’inquiètent. Tout ce petit monde n’est pas prêt, disent-ils. Donnez-nous le temps de les rendre sociables et religieux, après quoi ils seront mûrs pour la liberté (15). On redécouvre, comme avant la Révolution, le charme vénéneux des « moratoires » (16), qui seront consacrés à « préparer l’esclave à son avenir d’homme libre par un dernier effort de moralisation » (17). remarquons en passant que la minorité protestante est, sans aucun doute, majoritaire sur les lignes de l’abolitionnisme ; et pas seulement parce qu’elle pousse plus loin que le commun l’analyse des réalités économiques favorables à l’émancipation et à l’accès des esclaves au droit, mais aussi pour des raisons théologiques, pastorales en tout cas, dont l’évidence saute aux yeux (18).
« Moraliser » les esclaves pour qu’ils soient dignes de la liberté, c’est une fort jolie chose : encore faut-il dédommager les maîtres. Voilà un point sur lequel planteurs et abolitionnistes semblent être d’accords (19). Planteurs et abolitionnistes que rejoignent sur ce point les penseurs les plus illustres. Ecoutons Tocqueville : « Si les Nègres ont droit à devenir libres, il est incontestable que les colons ont droit à n’être pas ruinés par la libertés des Nègres. » (20)
Victor Schoelcher lui-même songea dans sa jeunesse au dédommagement des maîtres, et à un moratoire précédant l’abolition, qu’il calibra entre quarante et soixante années, soixante lui semblant la meilleure longueur, le temps pour les maîtres de bien préparer leurs esclaves à jouir avec modération de la liberté à venir. Mais il ne tarda guère à constater que la mauvaise volonté des planteurs était, et demeurerait, incommensurable (21).
Si l’Etat sous Louis-Philippe libérait les esclaves de ses possessions dès 1845, Schoelcher avait abandonné toute idée de moratoire dès 1840. Dès cette année-là, il se battra indéfectiblement pour l’émancipation générale et immédiate. Assortie, certes, d’un dédommagement pour les maîtres. On sait avec quelle ténacité l’Alsacien, dont conservateurs, esclavagistes et bien-pensants raillaient la « négrophilie », lutta pour l’abolition sur le triple front de l’émancipation immédiate, de l’antiracisme sans nuance, de l’opposition à toute velléité de résurgence de la traite (22).
1848 : II° République. Des partisans de l’abolition sont au pouvoir. Schoelcher est nommé sous-secrétaire aux colonies. La II° République, qui ne vivra pas longtemps, a deux mois lorsque Arago – le Catalan – et Schoelcher abolissent définitivement l’esclavage. Le Code Noir passe pour toujours des prétoires aux archives.
4 mars : « Au nom du peuple français, le gouvernement provisoire de la République, considérant que nulle terre française ne peut plus porter d’esclaves, décrète : une commission est instituée auprès du ministère provisoire de la Marine et des Colonies pour préparer, sous le plus bref délai, l’acte d’émancipation immédiate de toutes les colonies de la République. Le ministre de la Marine pourvoira à l’exécution du présent décret. » Le même jour Victor Schoelcher est nommé président de cette commission.
28 avril : « Le gouvernement provisoire, considérant que l’esclavage est un attentat contre la dignité humaine ; qu’en détruisant le libre arbitre de l’homme, il supprime le principe naturel du droit et du devoir ; qu’il est une violation flagrante du dogme républicain « liberté – égalité – fraternité » ; considérant que si des mesures effectives ne suivaient pas de très près la proclamation déjà faite du principe de l’abolition, il en pourrait résulter dans les colonies les plus déplorables désordres, décrète : Article 1, l’esclavage sera entièrement aboli dans toutes les colonies et possessions françaises, deux mois après la promulgation du présent décret dans chacune d’elles [suivent huit autres articles]. Fait à Paris, en Conseil de gouvernement le 27 avril 1848. Les membres du gouvernement provisoire. »
Sur place en Amérique du Vent on ne glissera certes pas facilement du noir au rose, si j’ose dire. Trente ans plus tard, on parlera encore là-bas des innombrables méfaits de l’abolition ; la presse blanche n’en finira pas d’y remâcher la nécessité de rétablir l’esclavage, et de théoriser ferme sur l’infériorité et l’animalité des Noirs (23). Mais un pas définitif est donné avec l’abolition de 1848.
Certes, l’environnement international, politique et économique, exigeait l’abolition avec plus de force encore au milieu du XIX° siècle qu’il ne le faisait soixante ans plus tôt. Il convient néanmoins de souligner le courage et la ténacité d’un homme, dont les motivations ne semblent pourtant pas avoir été celles de quelqu’un qui aurait abreuvé son esprit à la source pure des Lumières. Un courage, une ténacité sans lesquels le Noir aurait eu droit aux fers et à l’inexistence juridique pendant Dieu sait combien de décennies encore. (24)
Et la traite ? Interdite dans sa forme officielle et classique dès avril 1818, elle ne s’effondre pas, loin s’en faut. Le trafic des négriers – illégal, mais réalisé au vu et au su de chacun – sera considérable jusqu’en 1833 au moins ; endémique et moribond, il n’en finit pas de ne pas désarmer. Illégal, ce trafic dont la France se débarrasse en suivant sans aucune originalité l’exemple de l’Angleterre est pratiqué encore après l’abolition. Sur d’autres itinéraires. Sans trop d’aménagements par rapport aux vieilles méthodes (25). A ce propos, « le mouvement abolitionniste français reste silencieux (…) En fait l’Abolitionniste français, son organe principal, prôna en 1849 l’adoption d’un système semblable pour l’Algérie. » (26)
Pourquoi l’Algérie ? Nous sommes à l’heure de la poussée française en Afrique continentale. La France ne veut plus chasser seulement dans le continent austral. Elle entend y rester. L’inonder, probablement, de ses Lumières ; y faire naître le soleil d’un autre matin.
A l’horizon, Ferry. Et le traité de Berlin : 1885, sinistre célébration du deuxième centenaire du Code Noir.
Au troisième centenaire, le blanco-biblisme mouille encore la lèvre de ceux qui assassinent en toute légalité des Noirs dont le seul crime consiste à exister sur leur sol et à y revendiquer l’exercice de la plénitude de leur droit. A paris, des graffiti énoncent dans les couloirs du métro, et dans ceux de la Sorbonne, cette stupéfiante équation : « Noirs = Singes verts ».
Louis Sala-Molin
le Code Noir ou le calvaire de Canaan / 1987
[les notes, étant très volumineuses, n'ont pas été reproduites]
Voir Petite histoire des colonies françaises aux éditions FLBLB
Sur le Silence qui parle : Petite histoire du grand Texas

Le Code Noir (ou le calvaire de Canaan) / Louis Sala-Molins dans Agora




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