Archive pour la Catégorie 'Dehors'

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La Structure psychologique du fascisme / Georges Bataille

La description psychologique de la société doit commencer par la partie la plus accessible à la connaissance — en apparence, partie fondamentale — dont le caractère significatif est l’homogénéité (2) tendancielle. Homogénéité signifie ici commensurabilité des éléments et conscience de cette commensurabilité (les rapports humains peuvent être maintenus par une réduction à des règles fixes basées sur la conscience de l’identité possible de personnes et de situations définies ; en principe ; toute violence est exclue du cours d’existence ainsi impliqué).
La base de l’homogénéité sociale est la production (3). La société homogène est la société productive, c’est-à-dire la société utile. Tout élément inutile est exclu, non de la société totale, mais de sa partie homogène. Dans cette partie, chaque élément doit être utile à un autre sans que jamais l’activité homogène puisse atteindre la forme de l’activité valable en soi. Une activité utile a toujours une commune mesure avec une autre activité utile, mais non avec une activité pour soi.
La commune mesure, fondement de l’homogénéité sociale et de l’activité qui en relève, est l’argent, c’est-à-dire une équivalence chiffrable des différents produits de l’activité collective. L’argent sert à mesurer tout travail et fait de l’homme une fonction de produits mesurables. Chaque homme, selon le jugement de la société homogène, vaut selon ce qu’il produit, c’est-à-dire qu’il cesse d’être une existence pour soi: il n’est plus qu’une fonction, ordonnée a l’intérieur de limites mesurables, de la production collective (qui constitue une existence pour autre chose que soi).
Mais l’individu homogène n’est véritablement fonction de ses produits personnels que dans la production artisanale, lorsque les moyens de production sont relativement peu coûteux et peuvent être possédés par l’artisan. Dans la civilisation industrielle, le producteur se distingue du possesseur des moyens de production et c’est ce dernier qui s’approprie les produits : en conséquence, c’est lui qui, dans la société moderne, est fonction des produits ; c’est lui, et non le producteur, qui fonde l’homogénéité sociale.
Ainsi dans l’ordre actuel des choses, la partie homogène de la société est formée par ceux des hommes qui possèdent les moyens de production ou l’argent destiné à leur entretien et à leur achat. C’est dans la classe dite capitaliste ou bourgeoise, exactement dans la partie moyenne de cette classe, que s’opère, à la base, la réduction tendancielle du caractère humain à une entité abstraite et interchangeable, reflet des choses homogènes possédées.
Cette réduction s’étend ensuite, autant que possible, aux classes dites généralement moyennes, qui bénéficient de parts du profit appréciées. Mais le prolétariat ouvrier reste en grande partie irréductible. La position qu’il occupe par rapport à l’activité homogène est double: celle-ci l’exclut non quant au travail, mais quant au profit. En tant qu’agents de production, les ouvriers entrent dans les cadres de l’organisation sociale, mais la réduction homogène ne touche en principe que leur activité salariée ; ils sont intégrés dans l’homogénéité psychologique quant à leur comportement professionnel, non généralement en tant qu’hommes. Hors de l’usine, et même hors de ses opérations techniques, un ouvrier est par rapport à une personne homogène (patron, bureaucrate, etc.) un étranger, un homme d’une autre nature, d’une nature non réduite, non asservie.
Georges Bataille
La Structure psychologique du fascisme / 1933

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Publié dans La Critique sociale puis dans Hermès

À lire : La Revue des ressources

Revue Acéphale : Réparation à Nietzsche / 1937

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Entretien avec Pascal Auger : autour de Deleuze et du cinéma / Nicolas Rousseau

« Je m’intéressais au cinéma de recherche. J’avais vu à la télé des films de Norman MacLaren, tournés image par image, qui m’avaient bien plu. Je me disais que ce serait bien de trouver, s’ils existaient, des enseignants ayant à me dire des choses là-dessus, sur ces voies un peu inexplorées du cinéma. Je ne savais pas pourquoi, mais même si j’aimais comme tout le monde les films de fiction, ce n’était pas ce que je voulais tourner. Dans la réalité, à la fac de Vincennes, il n’y avait à cette époque presque pas de matériel pour réaliser des films. Les films coûtaient très cher, même en 16mm. On avait droit à environ trente mètres de pellicule par an, ce qui représente deux minutes trente de tournage. Ce n’est presque rien. La vidéo est arrivée au tournant des années 1980. »

Lire l’entretien intégral ICI / Actua Philosophia

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Rêver l’obscur – Femmes, magie et politique / Starhawk

Déesses et dieux : le paysage de la culture
La magie a souvent été pensée comme l’art de faire devenir vrais les rêves ; l’art de réaliser les visions. Mais avant que nous puissions rendre réelle la vision d’une culture intégrée, nous devons la voir. Nous devons avoir de nouvelles images à l’esprit, nous aventurer dans un paysage transformé, raconter de nouvelles histoires. Mais les histoires de la mise à distance ont formé nos esprits ; comment nouslibérer d’elles si une vision nouvelle n’est pas déjà là pour nous aider ?
Les images et les histoires de l’immanence abondent dans notre passé culturel, dans les mythes et les religions de nombreuses cultures contemporaines. Aussi notre recherche de vision nous amène-t-elle invitablement au royaume de la religion, même si nous ne voulons pas y aller : ce que nous nommons religion est le terreau de la culture, dans lequel poussent consciemment ou inconsciemment les systèmes de croyances, les histoires, les formes de pensée sur lesquels sont basés toutes les autres institutions.
Quand nous nous tournons vers les religions de l’immanence, que nous les appelions sorcellerie, paganisme polythéisme ou spiritualité, que nous prenions nos sources dans les mythologies celtique, grecque, amérindienne, orientale ou africaine, nous rencontrons un paradoxe. Nous rencontrons le Dieu/Déesse : le tout, la fabrication intriquée de l’être, la danse, la tisserande et le réseau des connexions, le schème, la spirale. Nous disons « Elle ». Mais Elle est avant le sexe ; celle dont le nom ne peut épelé car Elle est le cercle – avant qu’il soit brisé par un nom qui sépare.
Mais la Déesse a de nombreux noms : Isis, Ceridwen, Astarté, Miriam, Oshun, White Buffalo Woman, Kuan Yin, Diana, Amaterasu, Ishtar, la Femme changeante, Yemaya… et Elle a de nombreux aspects : Jeune Fille, Mère, Vieille, Lune, Terre, Arbre, Étoile, Flamme, Déesse du chaudron, Déesse du foyer, Guérisseuse, Araignée, Dame des choses sauvages. Le Dieu qui est son aspect mâle, l’autre pôle de cette unité à l’origine non brisée, a aussi de nombreux noms : Pan, Dionysos, Osiris, Dumuzi, Baal, Lugh, Coyote, Alegba… et Il a aussi de nombreux aspects : Enfant, Danseur, Père, Semeur, Dieu cornu, Chasseur, Dieu mourant, Guérisseur, Homme vert, Soleil, Arbre, Pierre levée.
Depuis Jung, beaucoup de penseurs qui explorent la mythologie ont considéré les Déesses et les Dieux comme des archétypes qui représentent les structures sous-jacentes de l’âme humaine. Les archétype ont été réalisés en dualités – ils nous disent comment diviser le monde et ss pouvoirs, comment diviser notre nature en parts masculine et féminine, en dépit du fait qu’historiquement les aspects des Déesses et des Dieux se recouvrent et s’échangent (1). Elle peut être Soleil et Lui peut être la Lune ; Elle peut être Ciel et Il peut être Terre ; les deux ont à jouer leur rôle dans le drame de la naissance, de la croissance et de la mort.
Le concept d’archétypes est lui-même un symptôme de la mise à distance ; il est dérivé de la notion platonicienne d’un monde qui n’est pas réel mais n’est qu’une ombre, l’imitation de formes parfaites préexistantes. Pour une sorcière, le monde lui-même est la réalité. Les Déesses et les Dieux ne sont pas de simples entités psychologiques, existant dans l’âme comme si l’âme était une grote retirée du monde ; eux aussi sont réels, ils sont les moyens de penser-en-choses des forces réelles, des expériences réelles.
Starhawk
Rêver l’obscur / 1982 / 2015
Traduction Morbic

Paru chez Cambourakis

À lire sur le Silence qui parle :
Des sorcières à Seattle
Nous sommes la chatte future

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1 Cf. Ochsborn, Judith, The Female Experience and the Nature of the Divine, op. cit.

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