L’ascenseur. Il y a plus de choses dans un ascenseur d’hôpital que dans toute la philosophie.
Tous, les uns contre les autres. Les regards : antennes, tentacules, pseudopodes qui se cherchent, se frôlent, se tâtent. S’attardent, se dérobent. Chaleureux ou glacés. Ça va ? Faut bien. Comme un lundi. Médecins et aides-soignantes. Hommes et femmes, blancs et noirs. Brèves rencontres. Les élèves, polycopiés de cours à la main. Internes sortants de garde, soulagés, farauds, cool, faussement décontractés. Des professeurs et des garçons de salle. Tout près, se touchant. S’ignorant. Bref coup d’œil sur le badge. Symbolique à nu. Frontières imperceptibles, présentes, douloureuses. Qui c’est ? Ah oui. En être ou pas. Tutoiement, prénoms. Salut ! Un malade sur une civière. Le patient, allongé, semble perdu. Le rassurer. Quelques mots. Et puis ne pas oublier d’acheter un journal parce qu’à la consultation faudra attendre. Combien de temps ? Sais pas. Pédiatrie, septième étage. Charlotte. Timide, apeurée. « C’est ton doudou ? – Oui d’un signe de tête. » Vite nounours disparaît. Caché derrière le dos. Jardin secret. Vie privée. Oh là ! Fausse manœuvre. Retour au sous-sol. La radio, la morgue.
Max Dorra
Leçons de solitude – l’hôpital / 2013
Extrait du texte publié dans Chimères n°78 / Soigne qui peut (la vie)
Sur le Silence qui parle : Soigne qui peut / Valérie Marange
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Photo : The Time That Remains (le Temps qu’il reste) / Eila Suleiman / 2009
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