Archive mensuelle de mai 2009

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Les plaisirs du cloître / Anonyme, XVIIIème siècle

Le Jésuite (sautant au col d’Agathe)
Ma reine, je vole à ta voix.
Que par ce baiser plein de flamme,
Répété mille et mille fois,
Tous mes feux passent dans ton âme !

Clitandre (aux genoux de Marton)
Vous me fuyez, Marton ; ah ! quelle cruauté !
Rendez-vous aux désirs de l’amant le plus tendre.
De mes transports cessez de vous défendre
Dans ces heureux moments faits pour la volupté.

Marton (se débattant)
Dans quel abîme, Agathe, ô ciel ! m’as-tu conduite !

Soeur Agathe
Eh quoi ? tu fais l’enfant ? tu prétends résister ?
Cède au plaisir sans hésiter. (elle l’embrasse)
Viens, timide Marton ; mon coeur te félicite
Du bonheur que tu vas goûter.

Le Jésuite (entraînant Agathe)
C’est assez ; laissons-les, ma chère ;
Pour accorder ces deux amants
Ta présence est peu nécessaire ;
Ne perdons point ainsi de précieux moments.

Soeur Agathe
Me siérait-il d’être sévère ?
Allons sur ce sopha voisin,
D’un torrent de plaisir viens inonder mon sein :
Je me livre à toi, mon cher père.
(ils se retirent vers le fond du théâtre, et se baisent)

Marton
(pendant que Clitandre la renverse sur le lit, et la trousse)
Ah ! Clitandre, que faites-vous ?
Quoi ! vous me mettez nue ?

Clitandre
Permets que j’adore à genoux
Les célestes attraits dont l’Amour t’a pourvue,
Laisse-moi de ton corps contempler la blancheur,
L’élasticité, la fraîcheur,
Pardonne un amoureux caprice :
De ce petit lieu de délices,
Qu’ombrage une épaisse toison,
Par ce baiser ardent je prends possession.

Marton (s’agitant)
Y pensez-vous ? cessez, Clitandre.

Clitandre (se jetant sur elle)
Bannis un ridicule effroi.

Marton
Tu te précipites sur moi,
Cruel, de tes transports je ne puis me défendre.
Laisse-moi, du moins, cher amant,
Me placer plus commodément.
(elle s’arrange et croise ses jambes sur les reins de Clitandre)

Soeur Agathe (se rapprochant)
Eh bien ! ami, Marton est-elle encore pucelle ?

Clitandre
J’ai soumis à la fin cette beauté rebelle
Dans ce petit antre charmant
Je vais porter l’embrasement.

Soeur Agathe
Ne la ménagez point.

Marton
Ah ! cruel ! quel martyre !
Quelle grosseur !… il me déchire…
Arrête… ouf !… il me crève… arrête un seul moment…
Le bourreau va toujours ; il ne veut pas m’entendre.

Le Jésuite
Sois insensible à son tourment :
Ce n’est pas le cas d’être tendre.

Marton
Il redouble… le chien… ah ! ah !

Clitandre
Je suis vainqueur.
Je vais, pour calmer ta douleur,
Verser sur ta blessure un baume salutaire ;
Le sens-tu ?… le sens-tu, ma chère ?

Marton (se trémoussant)
Je sens une douce chaleur
Qui me pénètre jusqu’au coeur.
Je sens distiller goutte à goutte…
Perce… enfonce, aimable vainqueur,
Ne t’amuse point sur la route…
Pousse, ami… pousse vivement…
Où suis-je ? je me meurs… soutiens-moi, cher amant…

Clitandre (se relevant)
Ma reine me pardonne-t-elle ?
Je sens ce qu’elle a dû souffrir.
Pour les jeunes beautés, nécessité cruelle,
Il faut par la douleur arriver au plaisir.

Marton (rabaissant ses jupons)
De joie et de regret tour à tour combattue,
J’ose à peine sur toi, cruel, lever la vue.
Adieu vertu, sagesse, honneur,
Un instant a souillé ma gloire et ma pudeur !
Cher Clitandre, ha ! du moins si tu m’étais fidèle !
On attaque, on subjugue, on oublie une belle ?

Clitandre (tendrement)
Bannis ces soupçons odieux.
Comblé de tes faveurs, je t’en aimerai mieux ;
Viens : je veux sur toi-même en sceller la promesse.

Marton (entraînant Clitandre)
Eh bien ! jouis de ma faiblesse ;
Monte sur ce lit avec moi.
Je m’abandonne toute à toi.

Le Jésuite (à Soeur Agathe)
Accompliront-ils seuls l’amoureux sacrifice ?
Soulage mon tourment, daigne, aimable novice,
M’offrir à contre-sens l’objet de mes désirs :
Tout chemin peut conduire au temple des plaisirs.

Soeur Agathe
Ah ! qu’un amant est tyrannique !
Tu le veux, il faut le vouloir.
(elle se place et relève ses cotillons ; le jésuite se courbe sur elle, et la menace d’une fausse attaque)
Point de caresse jésuitique,
Fripon, ou pour jamais je renonce à te voir.
Je ne prétends recevoir
Que par la route canonique.

Le Jésuite
Belle Agathe, sur moi tu connais ton pouvoir ;
Je ne te ferai point d’injure ;
Si parfois au collège, à nos jeunes garçons
Nous donnons de telles leçons,
C’est pour soulager la nature.
Soulève-toi, ma soeur.
Suis-je bien ?

Soeur Agathe
Pousse, avec vigueur…
Pousse, ami ; ne crains point d’ébranler ta monture.

Le Jésuite
Comme tu l’as gobé ! pour prix de ton ardeur,
Reçois ce trait de feu.

Soeur Agathe
Quelle flamme subtile
Dans mon coeur embrasé distille…
Ne finiras-tu point… je n’y saurais tenir…
Je vais expirer de plaisir.

Marton (tirant le jésuite par sa robe)
Allons donc, libertin, rendez-moi mon amie ;
Athlètes, suspendez vos coups ;
J’apporte des gâteaux pour Clitandre et pour vous ;
Ce vin rallumera votre flamme amortie.
Buvons ! à Bacchus, à l’Amour,
Rendons hommage tour à tour !
(ils mangent et boivent. Pendant ce temps, Agathe et Clitandre s’éclipsent)

Auteur anonyme
les Plaisirs du cloître / in le Théâtre érotique au XVIII° siècle
Autre scène à lire sur le Silence qui parle
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Le rire / Henri Bergson

(…) il serait chimérique de vouloir tirer tous les effets comiques d’une seule formule simple. La formule existe bien, en un certain sens ; mais elle ne se déroule pas régulièrement. Nous voulons dire que la déduction doit s’arrêter de loin en loin à quelques effets dominateurs, et que ces effets apparaissent chacun comme des modèles autour desquels se disposent, en cercle, de nouveaux effets qui leur ressemblent. Ces derniers ne se déduisent pas de la formule, mais ils sont comiques par leur parenté avec ceux qui s’en déduisent. Pour citer encore une fois Pascal, nous définirons volontiers ici la marche de l’esprit par la courbe que ce géomètre étudia sous le nom de roulette, la courbe que décrit un point de la circonférence d’une roue quand la voiture avance en ligne droite : ce point tourne comme la roue, mais il avance aussi comme la voiture. Ou bien encore il faudra penser à une grande route forestière, avec des croix ou carrefours qui la jalonnent de loin en loin : à chaque carrefour on tournera autour de la croix, on poussera une reconnaissance dans les voies qui s’ouvrent, après quoi l’on reviendra, à la direction première. Nous sommes à un de ces carrefours. Du mécanique plaqué sur du vivant, voilà une croix où il faut s’arrêter, image centrale d’où l’imagination rayonne dans des directions divergentes. Quelles sont ces directions ? On en aperçoit trois principales. Nous allons les suivre l’une après l’autre, puis nous reprendrons notre chemin en ligne droite.
I. — D’abord, cette vision du mécanique et du vivant insérés l’un dans l’autre nous fait obliquer vers l’image plus vague d’une raideur quelconque appliquée sur la mobilité de la vie, s’essayant maladroitement à en suivre les lignes et à en contrefaire la souplesse. On devine alors combien il sera facile à un vêtement de devenir ridicule. On pourrait presque dire que toute mode est risible par quelque côté. Seulement, quand il s’agit de la mode actuelle, nous y sommes tellement habitués que le vêtement nous paraît faire corps avec ceux qui le portent. Notre imagination ne l’en détache pas. L’idée ne nous vient plus d’opposer la rigidité inerte de l’enveloppe à la souplesse vivante de l’objet enveloppé. Le comique reste donc ici à l’état latent. Tout au plus réussira-t-il à percer quand l’incompatibilité naturelle sera si profonde entre l’enveloppant et l’enveloppé qu’un rapprochement même séculaire n’aura pas réussi à consolider leur union : tel est le cas du chapeau à haute forme, par exemple. Mais supposez un original qui s’habille aujourd’hui à la mode d’autrefois : notre attention est appelée alors sur le costume, nous le distinguons absolument de la personne, nous disons que la personne se déguise (comme si tout vêtement ne déguisait pas), et le côté risible de la mode passe de l’ombre à la lumière.
Nous commençons à entrevoir ici quelques-unes des grosses difficultés de détail que le problème du comique soulève. Une des raisons qui ont dû susciter bien des théories erronées ou insuffisantes du rire, c’est que beaucoup de choses sont comiques en droit sans l’être en fait, la continuité de l’usage ayant assoupi en elles la vertu comique. Il faut une solution brusque de continuité, une rupture avec la mode, pour que cette vertu se réveille. On croira alors que cette solution de continuité fait naître le comique, tandis qu’elle se borne à nous le faire remarquer. On expliquera le rire par la surprise, par le contraste, etc., définitions qui s’appliqueraient aussi bien à une foule de cas où nous n’avons aucune envie de rire. La vérité n’est pas aussi simple.
Mais nous voici arrivés à l’idée de déguisement. Elle tient d’une délégation régulière, comme nous venons de le montrer, le pouvoir de faire rire. Il ne sera pas inutile de chercher comment elle en use.
Pourquoi rions-nous d’une chevelure qui a passé du brun au blond ? D’où vient le comique d’un nez rubicond ? et pourquoi rit-on d’un nègre ? Question embarrassante, semble-t-il, puisque des psychologues tels que Hecker, Kraepelin, Lipps se la posèrent tour à tour et y répondirent diversement. Je ne sais pourtant si elle n’a pas été résolue un jour devant moi, dans la rue, par un simple cocher, qui traitait de « mal lavé » le client nègre assis dans sa voiture. Mal lavé ! un visage noir serait donc pour notre imagination un visage barbouillé d’encre ou de suie. Et, conséquemment, un nez rouge ne peut être qu’un nez sur lequel on a passé une couche de vermillon. Voici donc que le déguisement a passé quelque chose de sa vertu comique à des cas où l’on ne se déguise plus, mais où l’on aurait pu se déguiser. Tout à l’heure, le vêtement habituel avait beau être distinct de la personne ; il nous semblait faire corps avec elle, parce que nous étions accoutumés à le voir. Maintenant, la coloration noire ou rouge a beau être inhérente à la peau : nous la tenons pour plaquée artificiellement, parce qu’elle nous surprend.
De là, il est vrai, une nouvelle série de difficultés pour la théorie du comique. Une proposition comme celle-ci : « mes vêtements habituels font partie de mon corps », est absurde aux yeux de la raison. Néanmoins l’imagination la tient pour vraie. « Un nez rouge est un nez peint », « un nègre est un blanc déguisé », absurdités encore pour la raison qui raisonne, mais vérités très certaines pour la simple imagination. Il y a donc une logique de l’imagination qui n’est pas la logique de la raison, qui s’y oppose même parfois, et avec laquelle il faudra pourtant que la philosophie compte, non seulement pour l’étude du comique, mais encore pour d’autres recherches du même ordre. C’est quelque chose comme la logique du rêve, mais d’un rêve qui ne serait pas abandonné au caprice de la fantaisie individuelle, étant le rêve rêvé par la société entière. Pour la reconstituer, un effort d’un genre tout particulier est nécessaire, par lequel on soulèvera la croûte extérieure de jugements bien tassés et d’idées solidement assises, pour regarder couler tout au fond de soi-même, ainsi qu’une nappe d’eau souterraine, une certaine continuité fluide d’images qui entrent les unes dans les autres. Cette interpénétration des images ne se fait pas au hasard. Elle obéit à des lois, ou plutôt à des habitudes, qui sont à l’imagination ce que la logique est à la pensée.
Suivons donc cette logique de l’imagination dans le cas particulier qui nous occupe. Un homme qui se déguise est comique. Un homme qu’on croirait déguisé est comique encore. Par extension, tout déguisement va devenir comique, non pas seulement celui de l’homme, mais celui de la société également, et même celui de la nature.
Commençons par la nature. On rit d’un chien à moitié tondu, d’un parterre aux fleurs artificiellement colorées, d’un bois dont les arbres sont tapissés d’affiches électorales, etc. Cherchez la raison ; vous verrez qu’on pense à une mascarade. Mais le comique, ici, est bien atténué. Il est trop loin de la source. Veut-on le renforcer ? Il faudra remonter à la source même, ramener l’image dérivée, celle d’une mascarade, à l’image primitive, qui était, on s’en souvient, celle d’un trucage mécanique de la vie. Une nature truquée mécaniquement, voilà alors un motif franchement comique, sur lequel la fantaisie pourra exécuter des variations avec la certitude d’obtenir un succès de gros rire. On se rappelle le passage si amusant de Tartarin sur les Alpes où Bompard fait accepter à Tartarin (et un peu aussi, par conséquent, au lecteur) l’idée d’une Suisse machinée comme les dessous de l’Opéra, exploitée par une compagnie qui y entretient cascades, glaciers et fausses crevasses. Même motif encore, mais transposé en un tout autre ton, dans les Novel Notes de l’humoriste anglais Jerome K. Jerome. Une vieille châtelaine, qui ne veut pas que ses bonnes œuvres lui causent trop de dérangement, fait installer à proximité de sa demeure des athées à convertir qu’on lui a fabriqués tout exprès, de braves gens dont on a fait des ivrognes pour qu’elle pût les guérir de leur vice, etc. Il y a des mots comiques où ce motif se retrouve à l’état de résonance lointaine, mêlé à une naïveté, sincère ou feinte, qui lui sert d’accompagnement. Par exemple, le mot d’une dame que l’astronome Cassini avait invitée à venir voir une éclipse de lune, et qui arriva en retard : « M. de Cassini voudra bien recommencer pour moi. » Ou encore cette exclamation d’un personnage de Gondinet, arrivant dans une ville et apprenant qu’il existe un volcan éteint aux environs : « Ils avaient un volcan, et ils l’ont laissé s’éteindre ! »
Passons à la société. Vivant en elle, vivant par elle, nous ne pouvons nous empêcher de la traiter comme un être vivant. Risible sera donc une image qui nous suggérera l’idée d’une société qui se déguise et, pour ainsi dire, d’une mascarade sociale. Or cette idée se forme dès que nous apercevons de l’inerte, du tout fait, du confectionné enfin, à la surface de la société vivante. C’est de la raideur encore, et qui jure avec la souplesse intérieure de la vie. Le côté cérémonieux de la vie sociale devra donc renfermer un comique latent, lequel n’attendra qu’une occasion pour éclater au grand jour. On pourrait dire que les cérémonies sont au corps social ce que le vêtement est au corps individuel : elles doivent leur gravité à ce qu’elles s’identifient pour nous avec l’objet sérieux auquel l’usage les attache, elles perdent cette gravité dès que notre imagination les en isole. De sorte qu’il suffit, pour qu’une cérémonie devienne comique, que notre attention se concentre sur ce qu’elle a de cérémonieux, et que nous négligions sa matière, comme disent les philosophes, pour ne plus penser qu’à sa forme. Inutile d’insister sur ce point. Chacun sait avec quelle facilité la verve comique s’exerce sur les actes sociaux à forme arrêtée, depuis une simple distribution de récompenses jusqu’à une séance de tribunal. Autant de formes et de formules, autant de cadres tout faits où le comique s’insérera.
Mais ici encore on accentuera le comique en le rapprochant de sa source. De l’idée de travestissement, qui est dérivée, il faudra remonter alors à l’idée primitive, celle d’un mécanisme superposé à la vie. Déjà la forme compassée de tout cérémonial nous suggère une image de ce genre. Dès que nous oublions l’objet grave d’une solennité ou d’une cérémonie, ceux qui y prennent part nous font l’effet de s’y mouvoir comme des marionnettes. Leur mobilité se règle sur l’immobilité d’une formule. C’est de l’automatisme. Mais l’automatisme parfait sera, par exemple, celui du fonctionnaire fonctionnant comme une simple machine, ou encore l’inconscience d’un règlement administratif s’appliquant avec une fatalité inexorable et se prenant pour une loi de la nature. Il y a déjà un certain nombre d’années, un paquebot fit naufrage dans les environs de Dieppe. Quelques passagers se sauvaient à grand-peine dans une embarcation. Des douaniers, qui s’étaient bravement portés à leur secours, commencèrent par leur demander « s’ils n’avaient rien à déclarer ». Je trouve quelque chose d’analogue, quoique l’idée soit plus subtile, dans ce mot d’un député interpellant le ministre au lendemain d’un crime commis en chemin de fer : « L’assassin, après avoir achevé sa victime, a dû descendre du train à contre-voie, en violation des règlements administratifs. »
Un mécanisme inséré dans la nature, une réglementation automatique de la société, voilà, en somme, les deux types d’effets amusants où nous aboutissons. Il nous reste, pour conclure, à les combiner ensemble et à voir ce qui en résultera.
Le résultat de la combinaison, ce sera évidemment l’idée d’une réglementation humaine se substituant aux lois mêmes de la nature. On se rappelle la réponse de Sganarelle à Géronte quand celui-ci lui fait observer que le cœur est du côté gauche et le foie du côté droit : « Oui, cela était autrefois ainsi, mais nous avons changé tout cela, et nous faisons maintenant la médecine d’une méthode toute nouvelle. » Et la consultation des deux médecins de M. de Pourceaugnac : « Le raisonnement que vous en avez fait est si docte et si beau qu’il est impossible que le malade ne soit pas mélancolique hypocondriaque ; et quand il ne le serait pas, il faudrait qu’il le devint, pour la beauté des choses que vous avez dites et la justesse du raisonnement que vous avez fait. » Nous pourrions multiplier les exemples ; nous n’aurions qu’à faire défiler devant nous, l’un après l’autre, tous les médecins de Molière. Si loin que paraisse d’ailleurs aller ici la fantaisie comique, la réalité se charge quelquefois de la dépasser. Un philosophe contemporain, argumentateur à outrance, auquel on représentait que ses raisonnements irréprochablement déduits avaient l’expérience contre eux, mit fin à la discussion par cette simple parole : « L’expérience a tort. » C’est que l’idée de régler administrativement la vie est plus répandue qu’on ne le pense ; elle est naturelle à sa manière, quoique nous venions de l’obtenir par un procédé de recomposition. On pourrait dire qu’elle nous livre la quintessence même du pédantisme, lequel n’est guère autre chose, au fond, que l’art prétendant en remontrer à la nature.
Ainsi, en résumé, le même effet va toujours se subtilisant, depuis l’idée d’une mécanisation artificielle du corps humain, si l’on peut s’exprimer ainsi, jusqu’à celle d’une substitution quelconque de l’artificiel au naturel. Une logique de moins en moins serrée, qui ressemble de plus en plus à la logique des songes, transporte la même relation dans des sphères de plus en plus hautes, entre des termes de plus en plus immatériels, un règlement administratif finissant par être à une loi naturelle ou morale, par exemple, ce que le vêtement confectionné est au corps qui vit. Des trois directions où nous devions nous engager, nous avons suivi maintenant la première jusqu’au bout. Passons à la seconde, et voyons où elle nous conduira.
II. — Du mécanique plaqué sur du vivant, voilà encore notre point de départ. D’où venait ici le comique ? De ce que le corps vivant se raidissait en machine. Le corps vivant nous semblait donc devoir être la souplesse parfaite, l’activité toujours en éveil d’un principe toujours en travail. Mais cette activité appartiendrait réellement à l’âme plutôt qu’au corps. Elle serait la flamme même de la vie, allumée en nous par un principe supérieur, et aperçue à travers le corps par un effet de transparence. Quand nous ne voyons dans le corps vivant que grâce et souplesse, c’est que nous négligeons ce qu’il y a en lui de pesant, de résistant, de matériel enfin ; nous oublions sa matérialité pour ne penser qu’à sa vitalité, vitalité que notre imagination attribue au principe même de la vie intellectuelle et morale. Mais supposons qu’on appelle notre attention sur cette matérialité du corps. Supposons qu’au lieu de participer de la légèreté du principe qui l’anime, le corps ne soit plus à nos yeux qu’une enveloppe lourde et embarrassante, lest importun qui retient à terre une âme impatiente de quitter le sol. Alors le corps deviendra pour l’âme ce que le vêtement était tout à l’heure pour le corps lui-même, une matière inerte posée sur une énergie vivante. Et l’impression du comique se produira dès que nous aurons le sentiment net de cette superposition. Nous l’aurons surtout quand on nous montrera l’âme taquinée par les besoins du corps, — d’un côté la personnalité morale avec son énergie intelligemment variée, de l’autre le corps stupidement monotone, intervenant et interrompant avec son obstination de machine. Plus ces exigences du corps seront mesquines et uniformément répétées, plus l’effet sera saisissant. Mais ce n’est là qu’une question de degré, et la loi générale de ces phénomènes pourrait se formuler ainsi : Est comique tout incident qui appelle notre attention sur le physique d’une personne alors que le moral est en cause.
Henri Bergson
le Rire, essai sur la signification du comique / 1900
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Félix Guattari ou la décroissance sous la forme des trois écologies. Remarques sur le parti imaginaire qui vient (2) / Clément Homs

Les luttes « décroissantes » qui viennent.
Ceci va bien entendu pousser Guattari – avec Deleuze et à la suite de Foucault -, à poser la question d’une redéfinition des formes des luttes contre les sociétés économiques et l’aliénation politique, et notamment en les pensant cette fois-ci d’un seul tenant. On comprend qu’après être venu au parti des Verts au milieu des années 80, Guattari ait vite déchanté pour finir par écrire en 1989 les Trois écologies, qui était finalement sa réponse à l’écologie des casernes partidaires et à son environnementalisme technocratique incapable de se lier à une écologie sociale véritable et surtout à une écologie mentale, c’est-à-dire une écosophie enfin dégagée de l’univers cybernétique de la gestion et autre administration des simples choses. Et faisant cette critique aux Verts, je ne veux pas dire que Guattari aurait été bien mieux entendu au sein du PPLD ou encore dans n’importe quel autre parti d’encadrement du bétail des votards, bien au contraire. On sait en effet depuis Simone Weil, que les partis politiques ne sont redevables d’aucune pensée cohérente et ne cherchent que la croissance illimitée de leur propre pouvoir dont l’informationnisme de positionnement sur tout et à peu près n’importe quoi, est le principe même de cette croissance.
Il faut donc changer de discours révolutionnaires, de luttes, de pratiques sociales, pour les transformer dans le travail en commun d’une nouvelle éthique, d’une « micro-politique du désir » que Guattari va définir à partir des réflexions de Foucault sur les interstices internes au tissu de la bio-politique. C’est donc peu dire que l’écosophie n’est en rien un étatisme écologiste ni ne relève plus largement de la sphère politique autonomisée, qui à l’image de celle de l’économique, s’interpénètrent continuellement pour ne faire plus qu’un. En effet, « il n’est plus possible de prétendre s’opposer à lui [le capitalisme] seulement de l’extérieur par les pratiques syndicales et politiques traditionnelles » comme le croient encore les derniers illusionnés de la politique qui inlassablement essayent de réanimer le cadavre du social et de la politique mais qui n’en ré-organisent finalement que les simulacres coupables. « Il est devenu également impératif d’affronter ses effets [du capitalisme] dans le domaine de l’écologie mentale au sein de la vie quotidienne individuelle, domestique, conjugale, de voisinage, de création et d’éthique personnelle. Loin de chercher un consensus abêtissant et infantilisant [comme le feraient les perspectives politiques et syndicales, toujours marquées par l’opposition mystificatrice à une extériorité transcendante], il s’agira à l’avenir de cultiver le dissenssus et la production singulière d’existence ». C’est donc à un véritable décentrement et déséquilibre vis-à-vis des pavloviens réflexes politiques et militants, une toute autre « re-politisation à la mesure d’un autre concept du politique » comme écrit J. Derrida, auquel Guattari nous invite. La politique comme mise en place de « politiques publiques » est renversée et n’est donc plus la solution pour faire face à l’aliénation économique qu’entraîne la réification par la forme-valeur du monde et de la vie en un « champ d’équivaloirs ». Et « l’écologie de l’imaginaire » qu’appelle Guattari est bien celle qui dit à la différence de l’écologie politique punitive, que « l’ennemi n’est pas seulement représenté par « les autres ». L’ennemi, c’est aussi nous-même, l’ennemi est dans notre tête comme écrit S. Latouche. Notre imaginaire à tous est colonisé. Nous avons tous besoin d’une catharsis », y compris et surtout les écologistes. L’avant-gardisme et les professionnels de la représentation ou de la militance qui savent toujours mieux ce qui est bon pour les autres, comme les fausses oppositions gauche/droite et « gauche de la gauche »/gauche de gouvernement, sont ainsi neutralisés et écartés comme autant de formes non vécues de territoires inexistentiels à faire décroître. L’ontologie capitaliste et sa valeur comme « forme sociale totale » n’est pas un ennemi qui nous est extérieur. « Il est assurément plus facile d’écrire sur les multinationales que sur la valeur, et il est plus facile de descendre dans la rue pour protester contre l’Organisation mondiale du commerce ou contre le chômage que pour contester le travail abstrait écrit Anselm Jappe. Il ne faut pas un grand effort mental pour demander une distribution différente de l’argent ou davantage d’emplois. Il est infiniment plus difficile de se critiquer soi-même en tant que sujet qui travaille et qui gagne de l’argent. La critique de la valeur est une critique du monde qui ne permet pas d’accuser de tous les maux du monde « les multinationales » ou « les économistes néolibéraux » pour continuer sa propre existence personnelle dans les catégories de l’argent et du travail sans oser les mettre en question par crainte de ne plus paraître « raisonnable ».
On le voit, c’est une perspective en ligne de fuite hors des sociétés de croissance, qui amène à une véritable décolonisation de l’imaginaire de la gauche et en particulier des extrêmes-gauche. Cette « écosophie de type nouveau poursuit Guattari, à la fois pratique et spéculative, éthico-politique et esthétique, me paraît donc devoir remplacer les anciennes formes d’engagement religieux, politique, associatif… Elle ne sera ni une discipline de repli sur l’intériorité, ni un simple renouvellement des anciennes formes de « militantisme ». Il s’agira plutôt d’un mouvement aux multiples facettes mettant en place des instances et des dispositifs à la fois analytiques et producteurs de subjectivité. Subjectivité tant individuelle que collective, débordant de toutes parts les circonscriptions individuées, « moïsées », clôturées sur des identifications et s’ouvrant tous azimuts du côté du socius mais aussi du côté des Phylum machiniques, des Univers de référence technico-scientifiques, des mondes esthétiques, du côté également de nouvelles appréhensions « pré-personnelles » du temps, du corps, du sexe… Subjectivité de la resingularisation capable de recevoir de plein fouet la rencontre avec la finitude sous l’espèce du désir, de la douleur, de la mort… ». Ces nouvelles praxis éco-logiques font parties de cette nouvelle stratégie révolutionnaire que Guattari aura théorisé en 1977 dans la Révolution moléculaire. La révolution comme l’avait déjà dit Marx, n’est pas une révolution politique, elle se fait au contraire minuscule, infinitésimale, et passe au travers de nos corps et de nos désirs. Son rythme propre n’est pas celui de l’urgence écologique à organiser la survie écologiste de la Méga-machine techno-politico-économique, il est aussi chaotique que rhizomatique. « Est-ce à dire que les nouveaux enjeux multipolaires des trois écologies se substitueront purement et simplement aux anciennes luttes de classe et à leurs mythes de référence ? Certes, une telle substitution ne sera pas aussi mécanique ! Mais il paraît cependant probable que ces enjeux, qui correspondent à une complexification extrême des contextes sociaux, économiques et internationaux, tendront à passer de plus en plus au premier plan ». Cette perspective dérangera très certainement les chantres de l’Etat jacobin redistributeur des valorisations capitalistes ou encore ceux de la forme autonomisée de la politique qui inlassablement surplombe, rationalise et logicialise la « socialité primaire » (A. Caillé). Guattari écrit à leur propos, que « l’on pourrait m’objecter que les luttes à grande échelle ne sont pas nécessairement en synchronie avec les praxis écologiques et les micro-politiques du désir. Mais c’est là toute la question : les divers niveaux de pratique non seulement n’ont pas à être homogénéisés, raccordés les uns aux autres sous une tutelle transcendante, mais il convient de les engager dans des processus d’hétérogenèse (…). Il convient de laisser se déployer les cultures particulières tout en inventant d’autres contrats de citoyenneté. Il convient de faire tenir ensemble la singularité, l’exception, la rareté avec un ordre étatique le moins pesant possible. L’éco-logique n’impose plus de « résoudre » les contraires, comme le voulaient les dialectiques hégéliennes et marxistes. En particulier dans le domaine de l’écologie sociale, il existera des temps de lutte où tous et toutes seront conduits à se fixer des objectifs communs et à se comporter « comme de petits soldats » – je veux dire, comme de bons militants, mais, concurremment, il existera des temps de resingularisation où les subjectivités individuelles et collectives « reprendront leurs billes » et où, ce qui primera, ce sera l’expression créatrice en tant que telle, sans plus de soucis à l’égard des finalités collectives. Cette nouvelle logique écosophique, je le souligne, s’apparente à celle de l’artiste ».
Dans une perspective dont l’arrière-base est souvent deleuzo-guattarienne, le groupe Tiqqun écrit ainsi que les problèmes qui se posèrent aux Autonomes italiens de 1977 comme à Félix Guattari , nous ne nous les sommes pas encore posés. « Le passage des luttes sur les lieux de travail aux luttes sur le territoire, la recomposition d’un tissu éthique sur la base de la sécession, la question de la réappropriation des moyens de vivre, de lutter et de communiquer entre nous, forment un horizon inatteignable tant que ne sera pas admis le préalable existentiel de la separ/azione. Separ/azione signifie : nous n’avons rien à voir avec ce monde. Nous n’avons rien à lui dire, ni rien à lui faire comprendre. Nos actes de destruction, de sabotage, nous n’avons pas besoin de les faire suivre d’une explication dûment visée par la Raison humaine. Nous n’agissons pas en vertu d’un monde meilleur, alternatif, à venir, mais en vertu de ce que nous expérimentons d’ores et déjà, en vertu de l’irréconciliabilité radicale entre l’Empire et de cette expérimentation, dont la guerre fait partie. Et lorsqu’à cette espèce de critique massive, les gens raisonnables, les législateurs, les technocrates, les gouvernants demandent : « Mais que voulez-vous donc ? », notre réponse est : « Nous ne sommes pas des citoyens. Nous n’adopterons jamais votre point de vue de la totalité, votre point de vue de la gestion. Nous refusons de jouer le jeu, c’est tout. Ce n’est pas à nous de vous dire à quelle sauce nous voulons être mangés ». Nombreux objecteurs de croissance à travers la révolution moléculaire d’une dérive rurale qu’ils auto-organisent ici et maintenant, par les lieux qu’ils occupent et habitent afin de se réapproprier leur vie et lutter sans s’essouffler en dépendant le moins possible de la société échangiste de l’interdépendance marchande, forment déjà quelque unes des lignes de la circulation au sein du Parti imaginaire qui vient.
La transversalité des trois écologies et la nécessité de la « re-singularisation. »
Réagissant à l’écologie environnementaliste, à son conservatisme protecteur et à sa sanctuarisation de la nature qui ne font que sur-organiser la planète quand ils n’amènent pas à sa disneylandisation, Guattari refuse ainsi de « tomber dans le mythe animiste ou vitaliste, comme par exemple celui de l’hypothèse Gaïa de Lovelock et Margulis », qui d’ailleurs est très marqué par une approche cybernétique de l’écologie, comme peut l’être également l’œuvre assez minable de Georgescu-Roegen. A l’opposé de toute l’écologie essentiellement naturaliste et donc environnementaliste (dans sa forme biocentrique propre à l’école du Wilderness, comme dans la forme de l’équilibre éco-cybernétique de l’homme et de la nature), la grande idée de l’écosophie est qu’ »il n’est pas juste de séparer l’action sur la psyché, le socius et l’environnement (…). Il conviendrait désormais d’appréhender le monde à travers les trois verres interchangeables que constituent nos trois points de vue écologiques ». Pour Guattari, la vieille écologie politique dont il nous faut sortir tout comme il faut sortir de l’économie, doit alors laisser place à l’écosophie à venir. Il s’agit alors d’aborder de « nouvelles pratiques sociales, nouvelles pratiques esthétiques, nouvelles pratiques du soi dans le rapport à l’autre, à l’étranger, à l’étrange : tout un programme qui paraîtra bien éloigné des urgences du moment ! Et pourtant, c’est bien à l’articulation : de la subjectivité à l’état naissant ; du socius à l’état mutant ; de l’environnement au point où il peut être réinventer ; que se jouera la sortie des crises majeures de notre époque ». De plus comme nous l’avons dit, c’est parce que la mégamachine sociale, politique et techno-économique est d’un seul tenant, que « les trois écologies devraient être conçues, d’un même tenant, comme relevant d’une commune discipline éthico-esthétique et comme distinctes les unes des autres du point de vue des pratiques qui les caractérisent. Leurs registres relèvent de ce que j’ai appelé une hétérogenèse, c’est-à-dire de processus continu de re-singularisation. Les individus doivent devenir à la fois solidaires et de plus en plus différents ».
Et cette re-singularisation à travers la réappropriation de Territoires existentiels, ce « libre développement des individualités » dont parlait déjà Marx, le premier philosophe à avoir découvert l’immanence de la vie dans les termes les plus concrets, est bien la visée écosophique. Car on le sait – et Marx depuis Fourier qu’il a lu attentivement et réinterprété formidablement -, « quels que soient la forme et le contenu particulier de l’activité et du produit [les vilains patrons, les méchants financiers, comme les gentils salariés "exploités" ou les heureux écologistes], nous avons affaire à la valeur, c’est-à-dire à quelque chose de général qui est négation et suppression de toute individualité et de toute originalité ». Ainsi avec l’écosophie comme avec la décroissance, « l’histoire qui fait – qui fera – suite à l’économie marchande écrit Michel Henry, n’en sera pas moins l’histoire des individus, l’histoire de leur vie : en un sens, c’est ce qu’elle sera pour la première fois », car au travers de la sortie de l’économie marchande et de toute économie, « l’activité individuelle, la vie, la praxis n’est point abolie, elle est rendue à elle-même. Elle n’est plus déterminée par la production matérielle – cela veut dire : elle n’est plus doublée par un univers économique ». Comme l’écrit encore Henry, « il y a chez Marx une idée limite qui est finalement celle de l’élimination de l’économique, de la valeur d’échange et de l’argent. C’est une limite, mais pas une fiction ».
Cette re-singularisation là, en dehors de toutes subjectivités sérialisées plantées dans les champs d’équivaloir où pousse la forme-valeur, nous y reviendront, est bien la pierre d’angle de l’écosophie de Guattari. Et c’est peu dire qu’aujourd’hui, à part le singulier et précieux ouvrage de Jean-Claude Besson-Girard, Decrescendo cantabile, cette perspective là est peu discutée en termes concrets, c’est-à-dire de révolution de la vie quotidienne, ici et maintenant. Seuls les petits gestes gestionnaires de la simplicité volontaire et du reste du citoyennisme écologique sont acceptés sans débat, quand certains économes veulent sauver l’économie avec la décroissance en la suréquipant de sa simple morale de la responsabilité et de l’auto-limitation. Ce serrage écologiste de la ceinture économique semble bien être l’horizon indépassable de l’antiproductivisme simplet d’un certain écologisme décroissant. Il manque encore bel et bien dans la décroissance, cette transversalité écosophique entre l’écologie mentale, sociale et environnementale, puisque la « simplicité volontaire » n’a pour finalité que l’environnementalisme des gestionnaires économes de l’écologie antiproductiviste, dont elle n’est que l’attribut complémentaire à la poursuite d’une seule et même dépossession. Car finalement cette re-singularisation qu’appelle Guattari est exactement la perspective éthico-esthétique qu’adopte Besson-Girard quand il écrit que pour la décroissance la seule démarche qui compte finalement vraiment en terme d’écologie mentale, est « celle qui consisterait à dénombrer et à éclairer, par et pour chacun de nous, les territoires intérieurs de notre faculté de sentir, mis en jachère, atrophiés ou détruits par cette déculturation. Mais sommes-nous prêts à cet exercice de lucidité personnelle ? ». Et c’est là en effet que la décroissance se joue véritablement comme « écologie de l’imaginaire », beaucoup plus que sur les estrades des sex-shops politiques ou des peep-show médiatiques et encore moins dans les salons d’instituts réfléchissant avec des airs de grand sérieux à des listes de promesses estampillées « décroissance » pour l’alimentation planifié du « bétail des votards ».
Cependant dans cette perspective écologique d’une réappropriation de sa faculté de vivre, « le principe commun aux trois écologies écrit Guattari, consiste en ceci que les Territoires existentiels auxquels elles nous confrontent ne se donnent pas comme en-soi, fermé sur lui-même, mais comme pour-soi, précaire, fini, finitisé, singulier, singularisé, capable de bifurquer en réitérations stratifiées et mortifères ou en ouverture processuelle à partir de praxis permettant de le rendre « habitable » par un projet humain. C’est cette ouverture praxique qui constitue l’essence de cet art de « l’éco » subsumant toutes les manières de le domestiquer ». « Mettre au jour d’autres mondes que ceux de la pure information abstraite, engendrer des Univers de référence et des Territoires existentiels où la singularité et la finitude soient prises en compte par la logique multivalente des écologies mentales et par le principe d’Eros de groupe de l’écologie sociale et affronter le face-à-face vertigineux avec le Cosmos pour le soumettre à une vie possible, telles sont les voies enchevêtrées de la triple vision écologique ». « Il ne s’agit pas pour nous d’ériger des règles universelles à titre de guide de ces praxis, mais à l’inverse, de dégager les antinomies principielles entre les niveaux écosophiques ou, si l’on préfère, entre les trois visions écologiques ».
Clément Homs
Publié sur Nouveau millénaire, défis libertaires / avril 2007
(notes consultables sur le site d’origine)
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